Oui, faire la guerre à la finance

Cela fait presque deux semaines que la France s’est vue « dégrader » par l’agence Standard and Poor’s. Je n’ai pu, comme je l’eus voulu, réagir à l’événement, du fait de problèmes intervenus au niveau de l’hébergeur de mon blog. je vous livre aujourd’hui la note que j’avais écrite “à chaud”, en la refondant pour me permettre d’y traiter également de la manière dont le clan UMP s’efforce d’exploiter une situation qui le met pourtant en accusation et les inflexions que vient de connaître le positionnement de François Hollande. Avec, d’avance, toutes mes excuses pour la longueur que prend, du coup, cette réflexion…

Quels que soient les commentaires ampoulés qui l’auront accueilli, notamment dans une aire gouvernante ne sachant de quelle manière le banaliser, le coup d’éclat de S&P surdétermine à présent la campagne en vue des scrutins du printemps, il en redistribue les cartes et il en modifie substantiellement le climat, provoquant un choc aux retombées à ce jour imprévisibles dans les consciences. En tout état de cause, il sanctionne la totale faillite de l’approche libérale présidant aux destinées de l’Europe depuis deux ou trois décennies. Dans le même temps, la Grèce se sera rapprochée de la banqueroute, de par la volonté cynique de créanciers refusant, en dépit de la voracité dont ils ont fait preuve ces dernières années vis-à-vis de ce pays, de renoncer à ce que pourraient leur rapporter les obligations hellènes… s’ils consentaient à effacer 100 des 350 milliards de dettes en jeu.

Que reste-t-il des promesses de sortie de crise ressassées, sommet après sommet, par des chefs d’État et de gouvernement s’employant à convaincre leurs peuples des vertus de sacrifices s’appliquant impitoyablement aux moins fortunés ? Que demeure-t-il de ce fameux « Fonds européen de stabilité », dont les capacités d’intervention et l’abondement ont été littéralement torpillés par le verdict négatif des prétendus experts d’un organisme censé évaluer la fiabilité des économies, alors qu’il est lui-même une entreprise prospère (au chiffre d’affaires de 1,33 milliard de dollars en 2011), dont la clientèle privée autorise à contester l’indépendance ? Quel crédit peut encore revendiquer le traité auquel Madame Merkel et Monsieur Sarkozy entendent assujettir l’ensemble du continent, alors que leur fameuse ”« règle d’or »” austéritaire aura pour seul effet d’enfoncer chaque pays dans la récession… sans que ces agences devenues le bras armé des marchés ne s’estiment d’ailleurs satisfaites (S&P affirme ainsi qu’il ”« ne constitue pas une avancée d’envergure suffisante pour pouvoir répondre pleinement aux problèmes financiers de la zone euro »”) ? Combien de temps ladite zone euro pourra-t-elle encore échapper aux menaces d’éclatement la guettant depuis des mois, alors que l’une des conséquences, peut-être volontaire, de l’intervention des censeurs de la finance sera d’aiguiser les concurrences et de creuser les fractures entre ses membres, en fonction de la « notation » dont ils disposent désormais ?

Nicolas Sarkozy voit ici anéantir l’argumentation sur laquelle il pensait fonder la campagne de son hypothétique réélection. Se posant en monarque protecteur, il avait fort imprudemment justifié sa gestion, de rigueur drastique et d’injustice fiscale, par la nécessité de préserver le ”« trésor national »” d’un triple A présenté comme le signe de sa bonne maîtrise des affaires publiques. Acharné à soumettre l’Europe au directoire formé avec l’Allemagne, et plus encore à priver les élus de ses différentes nations de leur souveraineté sur les orientations budgétaires, il avait cru bon d’étaler sa morgue et son intransigeance à l’endroit des pays en proie aux assauts spéculatifs des banques et des fonds d’investissement, de la Grèce à l’Italie en passant par le Portugal ou l’Espagne. Le voilà privé de ce facteur de crédibilité qu’il croyait pouvoir retirer de son attelage avec Angela Merkel pour, à son tour, rejoindre le banc d’infamie où le précédèrent Andréas Papandréou, José Socrates, José-Luis Zapatéro ou Silvio Berlusconi. Il doit lui être bien cruel d’entendre un dirigeant grec lui rappeler qu’Athènes n’avait finalement représenté qu’un ”« laboratoire »” de l’âpreté au gain d’un capitalisme ayant poussé à son paroxysme sa financiarisation et sa globalisation…

UNE ONDE DE CHOC ÉCONOMIQUE ET POLITIQUE

Difficile, à ce stade, de décrire précisément ce que va provoquer une décision aussi symbolique que génératrice, à terme, d’un authentique tsunami économique et politique. Illustration des errements dorénavant incontrôlables d’un système manifestement à bout de souffle, on peut d’ores et déjà se montrer certain qu’il existera un « avant » et un « après » l’intervention de Standard and Poor’s. Non sur le plan des traductions financières immédiates, la nouvelle donne ayant été anticipée sur les marchés et par les banques, avec pour première conséquence la modération de la hausse des taux auxquels la France emprunte. Mais par les effets induits sur l’Hexagone et sur le continent…

Ainsi, après s’être depuis l’été recentrées sur ce que les économistes brevetés par les médias désignent comme une ”« crise des dettes souveraines »”, les coordonnées de la compétition électorale française vont-elles de nouveau se modifier, pour se cristalliser davantage autour de cette ligne appelée à départager acceptation servile des diktats de la finance et refus des règles absurdes que cette dernière prétend exiger du plus grand nombre. D’autant que, dans le pays, le chantage des agences de notation (celle qui a déjà dégradé la « note » française et celles qui nous ont placés ”« sous perspective négative »”) risque fort d’être reçu telle une humiliation nationale de nature, si la gauche ne se montrait pas à la hauteur, à approfondir désespérance devant l’avenir et réflexes de repli, pour finalement alimenter le fonds de commerce démagogique de Madame Le Pen.

Plus fondamentalement encore, qu’elle intervînt à court ou à moyen terme, l’aggravation de la crise et la désagrégation de l’Union européenne – sur les bases où elle fut fondée depuis l’Acte unique et le traité de Maastricht – pointe à l’horizon. Avec l’explosion en vol de la prétention sarkozyenne à diriger l’Europe en tandem avec Angela Merkel, ”« l’axe franco-allemand »” ne sera sans doute bientôt qu’un souvenir, sans toutefois que nos élites libérales disposent d’une architecture de rechange, et alors que la « dégradation » simultanée de plusieurs pays dessine en creux de nouveaux rapports de force et l’ouverture d’une phase encore plus aiguë d’affrontement entre ses membres. Écartelée entre adhérents au club sans cesse plus fermé des États jouissant toujours du AAA (Allemagne, Pays-Bas, Finlande et Luxembourg), pays « dégradés » en même temps que la France (Autriche, Slovaquie, Slovénie et Malte), et nations du sud européen reléguées au rang de perdants irréversibles de la « concurrence libre et non faussée, la zone euro voit se profiler devant elle un avenir des plus sombres.

DE L’ART DE FAIRE D’UN DÉSASTRE… UNE ARME DE DESTRUCTION MASSIVE

Il faut, cela dit, reconnaître à nos classes dirigeantes que, souvent à l’inverse des courants dominant toujours le camp du travail, elles savent ne jamais perdre de vue leurs intérêts fondamentaux. Quelles que soient les circonstances ! Les politiques mises en œuvre depuis 30 ans se soldant par une invraisemblable déconfiture, elles n’hésitent pas à en retourner la charge accusatoire… contre leurs victimes. Trois jours après la perte du triple A, l’éditorialiste de ”La Tribune” reconnaissait par exemple, sans barguigner, la responsabilité des pouvoirs de droite en place sous nos cieux depuis une décennie. Mais c’était pour mieux confronter l’opinion aux nouvelles règles du jeu exigées par ses mandants. Je le cite : ”« On peut appeler à la ‘’résistance’’ contre les marchés, diaboliser la finance apatride ou le complot américain. Cela ne changera rien : tant que l’on aura besoin de placer des emprunts de l’État auprès d’investisseurs étrangers, il faudra accepter le jugement qu’ils portent sur la qualité de la signature de notre pays. Or, même si la France, désormais notée AA+, conserve la deuxième meilleure note (sur une échelle de 22), la direction prise l’entraîne inéluctablement, si rien n’est fait, vers la seconde division. Europe du Nord ou Europe du Sud : c’est le choix stratégique qui attend les électeurs le 6 mai 2012. »” Ce culot d’acier se voyait surligné par le titre du papier : « Le diable s’habille en AA. » Remarquons néanmoins, au passage, que l’auteur de ces lignes – censées justifier la rigueur à perpétuité pour les classes travailleuses – avait involontairement pointé une alternative possible : lorsqu’il notait que la solution ayant ses faveurs valait… ”« tant que l’on aura besoin de placer des emprunts auprès d’investisseurs étrangers »” ! Tout le problème est bien là : ne plus se trouver sous la coupe des profiteurs de crise…

Dès lors que ce n’est nullement dans cette optique qu’agissent nos décideurs, il n’y a guère besoin de chercher longuement le sens du dispositif sur lequel Nicolas Sarkozy s’apprête à jouer sa campagne. Le « sommet anticrise » de ce 18 janvier – auquel avaient été convoquées les organisations syndicales -, autant que les décisions qu’il annoncera à la fin du mois, révèlent la démarche la plus cynique qui se puisse imaginer : exploiter les peurs devant la hausse du chômage, le développement de la précarité ou la multiplication des plans de licenciements pour non seulement justifier l’austérité que le futur traité européen entend graver dans le marbre des Constitutions nationales, mais favoriser le franchissement d’un palier qualitatif de la déréglementation libérale. Au nom de la baisse du « coût » du travail, et à partir de la liquidation de la durée légale du travail, il s’agit d’évidence d’aboutir à l’accroissement de la flexibilité conjuguée à l’achèvement de la destruction des mécanismes de protection sociale instaurés à la Libération (c’est ce à quoi tend cette TVA prétendument sociale que l’hôte de l’Élysée s’apprête à nous annoncer dans quelques jours). Clairement, le chef de file de la droite la plus brutale que nous ayons eu à affronter depuis 1945 s’inspire ici de la célèbre maxime du maréchal Foch lors de la Première Guerre mondiale : ”« Mon aile droite flanche ; mon aile gauche est enfoncée ; j’attaque au centre ! »”

« Au centre », précisément… de ce qu’il subsiste encore de l’acquis social que nous légua le Conseil national de la Résistance. Ne sous-estimons pas, en ce sens, l’ampleur de l’offensive qui se profile. Chaque matin, à peine achevée la lecture de ”l’Humanité”, le seul quotidien à rendre compte de l’action de notre Front de gauche, je me jette sur la presse de l’adversaire : on y saisit tellement mieux la politique de celui-ci, au contraire de ce qui sort de la bouche de ministres récitant mécaniquement les ”« éléments de langage »” diffusés chaque jour depuis la rue du faubourg Saint-Honoré. Justement, ce 17 janvier, Yves de Kerdrel, dans ”Le Figaro”, énonçait ”« quelques idées simples sur l’emploi »”. Très « simples », incontestablement, puisqu’on lisait sous sa plume qu’il convenait ”« de mettre entre parenthèses, pour une durée de trois ou cinq ans, l’obligation de créer un comité d’entreprise à partir de 50 salariés »” (éloquente, cette manière d’imaginer que « l’emploi » sera favorisé par la disparition du peu de droits dont disposent, à l’entreprise, les travailleurs et leurs syndicats) ; qu’il fallait ”« mettre en place des contrats de mission d’une durée qui pourrait atteindre 24 mois, voire plus »” (au prix, évidemment, de l’élargissement de la précarité du travail) ; que la mise à mort des 35 heures n’avait d’autre but que d’aboutir à la conclusion selon laquelle ”« la notion de durée légale du travail n’a plus de sens »” (ce qui est, la droite n’en fait plus mystère, le cœur du projet de société appelé à être défendu par son futur champion à la présidentielle)… Le Diable évoqué par ”La Tribune” prépare, à suivre son confrère de la presse Dassault, un authentique enfer pour les salariés !

FRANCOIS, IL EST L’HEURE DE SORTIR DE L’AMBIGUÏTÉ

On eût aimé que l’ensemble de la gauche sache faire preuve d’une semblable audace pour battre à plate couture cette prétention à anéantir les conquêtes essentielles du monde du travail. Hélas, François Hollande (ne parlons même pas d’Eva Joly, laquelle semble définitivement enlisée dans les sables mouvants d’une confrontation dont elle n’a jamais su saisir les enjeux) semble toujours aussi rétif à emprunter le chemin de l’épreuve de force, au risque de se laisser prendre au piège ourdi par le président sortant.

J’ai fait le choix de prendre sur mon repos dominical pour suivre le discours du Bourget, le 22 janvier. Certes, il sonna agréablement à mes oreilles d’entendre le candidat socialiste se référer aux principes de la République ou aux valeurs d’égalité portées par la France aux plus belles heures de soin histoire depuis la Grande Révolution, exposer son souci d’intégrer les fondements de la laïcité à la Loi fondamentale, souscrire à l’instauration du droit de vote des résidents étrangers aux élections locales, proclamer son intention de défier la finance voire de taxer le capital au même niveau que le travail, revendiquer son souhait de ”« changer les orientations de l’Europe »”. Mais ces nobles intentions ne suffiront pas à faire renaître l’espoir, à galvaniser le peuple de gauche, à susciter l’élan sans lequel on ne pourra battre la droite sur le fond et dans la durée. Surtout si les mots employés continuent, au final, à accompagner l’appel réitéré au ”« redressement »” des comptes publics.

Car, pour celles et ceux qui l’écoutèrent, ou dont le doute se faisait plus perceptible au fil des semaines, la question n’est pas de se trouver rassurés sur la sincérité – ou la profondeur – de l’engagement à gauche du porteur des couleurs socialistes. L’un comme l’autre ne font pas de doute. Le sujet d’interrogation porte sur son aptitude (et, surtout, sa détermination !) à se dégager du discours libéral dominant.

Cela ne passe-t-il pas par des mesures déterminées visant à casser la spéculation des banques et des fonds d’investissement, en commençant par changer les missions de la Banque centrale européenne afin qu’elle puisse prêter directement aux États à des taux quasi-nuls ? Par la récupération de la maîtrise du crédit, grâce à la nationalisation d’une série de grands établissements bancaires et la formation d’un pôle financier public, qui deviendra l’un des principaux leviers de cette réindustrialisation ou de cette transition écologique de l’économie auxquelles chacun tient désormais à se référer ? Par une politique de redistribution radicale des richesses, afin de fonder la relance de l’économie sur l’augmentation des salaires comme des pensions, mais aussi de redéployer les services publics et de rétablir la retraite à 60 ans à taux plein pour tous ? Par la convocation d’une Assemblée constituante, dans le but d’instaurer une VI° République donnant aux citoyens de nouveaux droits d’intervention dans la vie publique, surtout si l’on veut ”« rétablir la souveraineté de la République face aux marchés »”, pour paraphraser le candidat socialiste ? Par la sortie des traités libéraux qui ont conduit l’idée européenne à l’impasse dramatique qu’elle connaît, objectif incontournable sauf à se contenter d’assortir la ”« règle d’or »” merkelo-sarkozyste d’un volet sans véritable portée en faveur de la croissance ?

Eu égard à ces quelques points, seuls à pouvoir donner du contenu au défi lancé au monde de la finance dimanche dernier, l’interview de François Hollande au ”Monde” des 15 et 16 janvier n’avait rien pour rassurer. Exposant son plan de vol pour les premiers mois de son quinquennat, il indiquait entre autres qu’ils seraient ”« consacrés au redressement, au rétablissement des comptes publics et à la politique industrielle. Ensuite, nous pourrons retrouver des marges de manœuvre pour redistribuer ce que nous aurons créé. Tout sera fait pour la croissance, et c’est pourquoi je veux revoir l’accord européen pour lui ajouter cette dimension »”. Des termes qui ont été repris au Bourget et derrière lesquels il n’est guère difficile de discerner une manière de signifier aux citoyens que l’orthodoxie budgétaire sera au rendez-vous de la victoire sur le représentant de l’UMP et que, élu, le président socialiste ne cherchera même pas à remettre en cause les statuts et missions de la BCE, seule manière pourtant de briser les reins des assauts spéculatifs sur les taux d’intérêt.

C’est ce que, au demeurant, certains conseillers du candidat s’étaient empressés d’interpréter… en commençant à rogner la promesse de rétablissement des 60 000 postes supprimés dans l’Éducation nationale depuis 2007 (promesse devenue, selon eux, simple redéploiement au sein d’une Fonction publique de ce fait promise à subir encore les affres de la Révision générale des politiques publiques). On comprend, je dirais même que l’on ne peut que la partager, la réaction des principales figures de l’aile gauche du PS, qu’Henri Emmanuelli a résumé avec pertinence : ”« La campagne ne peut se réduire à une course à l’austérité entre droite et gauche.” (…) ”Pour gagner, il faut susciter un minimum d’espérance. Notre rôle est de redonner un peu d’espoir. »”

Henri Emmanuelli, Benoît Hamon ou Marie-Noëlle Lienemann ne verront sans doute pas d’inconvénient à ce que j’ajoute un considérant de pure efficience à leurs propos. En puisant, une fois n’est pas coutume, dans la prose aride d’une agence de notation. Après S&P, c’est en effet Moody’s qui, sans « dégrader » à ce stade l’Hexagone, a relevé que ”« les perspectives de croissance en France et à l’international présentent des risques significatifs pour les plans de consolidation du gouvernement français »”. Pouvait-on imaginer, de la part d’ardents zélateurs du dogme néolibéral, plus bel hommage du vice à la vertu, plus magnifique confirmation de ce que le Front de gauche ne cesse de marteler : en ruinant toute perspective de relance de l’activité, l’austérité constitue une impasse aussi dramatique pour les peuples qu’absurde économiquement.

NOUVELLE ÉTAPE POUR LE FRONT DE GAUCHE

Voilà bien la force de l’alliance initiée, voilà presque trois ans, par le Parti communiste, le Parti de gauche et Gauche unitaire, avant d’être tout récemment rejointe par quatre autres groupements. Elle fonde la radicalité de ses propositions sur le réalisme de ses appréciations quant à la gravité du moment historique, elle parle à partir de l’intérêt bien compris de la gauche dans son ensemble, elle porte haut les couleurs de l’espoir à reconstruire. Ce n’est donc pas un hasard si les sondages frémissent en sa faveur, si Jean-Luc Mélenchon réalisa l’un des plus forts taux d’audience de l’émission « Des paroles et des actes » le 12 janvier, si la rencontre que nous venons d’avoir avec Bernard Thibault et la direction de la CGT put si facilement (c’était le 17 janvier et j’en fus, avec Jean-Luc et Pierre Laurent, le témoin direct) accoucher de fortes convergences sur la manière d’appréhender la crise et de défendre les intérêts populaires.

Au lendemain de l’annonce de la perte du AAA français, notre candidat à la présidentielle formula la bonne proposition, à l’instant adéquat, celle qui eût dû immédiatement devenir celle de toute la gauche : l’exigence d’une modification des statuts comme des missions de la Banque centrale européenne et, en cas d’absence de consensus dans l’UE, l’adoption de dispositions d’autodéfense s’appliquant à l’échelle nationale (Jean-Luc parla, à titre indicatif, de la suspension des versements français au budget de l’Union et d’un emprunt forcé sur les banques hexagonales qui viennent de recevoir les mannes généreuses de la BCE à des taux « amis).

La preuve du pudding, c’est qu’il se mange, disait le vieil Engels. La justesse de la démarche de notre Front de gauche se mesure à la majorité potentielle dont ses propositions-clés disposent au sein de la gauche. Que François Hollande se sente poussé à infléchir la tonalité de son discours, ou que de nouvelles voix convergent avec la nôtre, sans par ailleurs renoncer à leurs propres options politiques, en forment de marqueurs. Reste à transformer l’essai. Ce qui passe par notre adresse à la gauche tout entière.

Pour parler clairement, lorsqu’est en jeu l’existence de millions d’hommes et de femmes, lorsque l’Europe fonce à tombeau ouvert dans le mur des logiques financières et de la profitabilité à n’importe quel prix, lorsque le devenir du pays s’annonce sous de si noirs auspices, il est du devoir des formations pour lesquelles votent les travailleurs de faire front pour ouvrir un chemin nouveau en défense de l’intérêt général. Au-delà des désaccords programmatiques que focalisent des candidatures différentes, il est aujourd’hui certain que le peuple trouverait un motif supplémentaire d’engagement et de résistance si tous les partis concernés, appuyés par le monde syndical, se rassemblaient déjà contre l’austérité et s’opposaient en commun à l’avidité sans bornes du capital. C’est tout l’enjeu de ”« l’offre publique de débat »” que nous adressons depuis des mois aux autres composantes de la gauche : faire en sorte que l’intervention des citoyens rendent possible une telle avancée, pour enclencher une redistribution générale des cartes et favoriser l’avènement d’une majorité et d’un gouvernement mettant résolument le cap à gauche.

Nous avons là notre feuille de route. Le Front de gauche a su, par ses seules forces réunies, s’imposer dans le jeu électoral. Il lui reste à devenir le levier qui permettra de faire bouger la gauche dans ses profondeurs et, au-delà, de changer la donne politique en France. Mais il est, d’ores et déjà, comme le dit fort justement l’amie Marie-George Buffet, une assurance que nous proposons aux électeurs de souscrire pour que la gauche gagne… sur le fond et dans la durée !

Christian_Picquet

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