Avec le Front de gauche, pour une alternative de rupture

Je suis en campagne pour le Front de gauche. Chaque soir, je participe à des meetings aux quatre coins du pays.
La semaine passée, je me serai retrouvé à Rennes (au côté de la tête de liste du « Grand Ouest », Jacques Généreux, et de ma camarade Annick Monot, une amie des bons et des mauvais jours à la LCR, où elle fut l’une des principales animatrices de la fédération du Morbihan), à la Maison de la chimie de Paris (pour une soirée de débat sur les réponses anticapitalistes au G 20, en compagnie des deux autres têtes de liste, Patrick Le Hyaric et Raquel Garrido), à Castelsarrasin (où j’ai tenu meeting avec Maïté Mola, du Parti communiste d’Espagne, Marie-Pierre Vieu, dirigeante du Parti communiste français, et Jean-Luc Mélenchon qui conduit la liste du « Sud-Ouest », où figure au titre de la Gauche unitaire un autre de mes vieux camarades, Denis Daumas, des Hautes-Pyrénées). J’ai terminé mon périple en lançant, samedi 4 avril, la caravane qui va sillonner la région parisienne pour y faire connaître le Front de gauche.

Cette semaine, la valse des meetings a repris, cette fois en région parisienne, où je suis la « tête de liste numéro trois » du Front de gauche, aux côtés de Patrick Le Hyaric et Raquel Garrido : le 6 avril, j’étais dans le 11ème arrondissement de Paris, le 7 à Évry, le 8 successivement à la faculté de Tolbiac et à Saint-Denis. Le 9 je serai à Palaiseau et le 10 devant les salariés de la RATP puis dans le 12ème arrondissement de la capitale…

I__l se trouve que toutes ces réunions sont amenées à répondre aux grandes questions et échéances du moment : la crise, la réunion du G 20 à Londres, le sommet de l’Otan à Strasbourg…__ Des enjeux cruciaux au regard desquels il est permis de vérifier la pertinence de la démarche de chacun des grands courants qui seront en présence pour le scrutin européen du 7 juin, et plus particulièrement celle du Front de gauche.

Je reproduis ci-dessous la trame de mon intervention à Castelsarrasin.

Intervention au meeting de Castelsarrasin, le 2 avril 2009

J’ai du plaisir à me retrouver parmi vous ce soir. Pour trois raisons. D’abord, parce que si j’ai mes quarante annuités d’engagement, c’est la première fois que l’on m’invite à Castelsarrasin ; j’en remercie vivement les organisations du Front de gauche sur ce département. Ensuite, parce que je retrouve à cette tribune des amis, qu’il m’a été donné de côtoyer déjà à nombreuses occasions. Enfin, parce que j’apporte tout particulièrement mon soutien à Denis Daumas, un ami de longue date, qui est des Hautes-Pyrénées et qui portera les couleurs de la Gauche unitaire.

Vous l’imaginez, j’aurais aimé me présenter devant vous en représentant de toute ma famille politique. J’appartiens à cette tradition, celle de la LCR, qui a donné naissance au Nouveau Parti anticapitaliste. Mais, dans cette campagne, je ne représenterai pas le NPA. Majoritairement, celui-ci a en effet décidé de claquer la porte au nez du Parti communiste et du Parti de gauche, qui lui proposaient de former un Front de gauche pour ces élections européennes. Cette logique du repli sur soi, du cavalier seul, de la concurrence absurde n’était pas supportable pour le collectif de militants qui considère depuis longtemps que l’alternative à gauche, celle dont nous avons un si urgent besoin, sera nécessairement le produit de la synthèse du meilleur des traditions de la gauche. Nous avons donc décidé de ne pas accepter, de ne pas sacrifier nos convictions à un prétendu « esprit de parti. Nous nous sommes constitués en Gauche unitaire, et nous voici devenus la troisième composante du Front de gauche.

Nous avons pris nos responsabilités, je tiens à le redire ce soir, sans rien gommer de notre identité. Nous savons que nous avons entre nous des différences. C’est le cas sur les questions de stratégie et sur la manière de parvenir à un gouvernement qui ne réédite pas les calamiteuses alternances du passé. C’est également le cas sur les questions de l’énergie, et du nucléaire en particulier : avec mes camarades communistes, nous avons une discussion à ce propos. Nul ne va, dans cette campagne, abdiquer de ses positions. Il n’en reste pas moins que nous avons un socle solide pour travailler dans le cadre d’une campagne pour l’élection du Parlement européen : c’est celui qui nous a rassemblés autour du « non » de gauche au traité constitutionnel européen. Et c’est plus que suffisant pour nous présenter ensemble devant les électeurs.

Depuis le 8 mars, où j’ai annoncé au Zénith de Paris notre décision de rejoindre le Front de gauche, et ce soir encore, beaucoup me félicitent pour le courage dont nous aurions fait preuve. Ces témoignages de sympathie et de solidarité nous vont évidemment droit au cœur. Nous avons pourtant simplement suivi ce que nous commandait de faire l’intérêt général. Quand je parle de l’intérêt général, je veux évidemment parler de celui du peuple de gauche, de celui du mouvement social, de celui de ces hommes et de ces femmes qui souffrent et espèrent que leur vie peut un jour changer.

En partant de ce point de vue, de ce seul point de vue, il importait pour nous de prendre la mesure de la situation à laquelle nous sommes confrontés.

Face à la crise

La crise est là, et la réunion du G 20, à Londres, nous en dit toute la profondeur. Regardez-les, tous ces dirigeants, Obama, Brown, Merkel, Berlusconi, Sarkozy… Tous vous disent qu’ils vont moraliser la sphère financière, réguler le système, que l’on va voir ce que l’on va voir… On voit, en effet…

Les désaccords que tous ces beaux messieurs ne parviennent plus à dissimuler sont à la mesure de leur désarroi. Cette crise est non seulement la plus grave que le monde capitaliste ait connu depuis 80 ans, depuis la Grande Dépression des années 1930, mais elle s’aggrave de jour en jour. En Allemagne, le ministère de l’Économie reconnaît que l’estimation d’une contraction de 2,5% du produit intérieur brut sera dépassée. La Commerzbank estime quant à elle que ledit PIB pourrait reculer de 7%. Le FMI indique, dans une note préparatoire à ce G 20, que le PIB mondial pourrait accuser une chute de 0,5% à 1%. La contraction pourrait être de 2,6% aux États-Unis et de 5,8% au Japon. Alan Greenspan, l’ancien président de la FED, va jusqu’à prévenir, dans un entretien au Financial Times, qu’il faudra nationaliser tout le système bancaire américain. Ces beaux esprits qui étalent leur sidération devant ce qu’ils ont provoqué, sont à l’image de M. Éric Le Boucher : ce chroniqueur ultralibéral nous expliquait jadis, dans Le Monde, que « l’hypercapitalisme est hypersympa » ; et le voilà qui se met maintenant à lancer de pathétiques appels au secours dans le quotidien Les Échos, qui l’emploie désormais : « Le système financier occidental est en train de mourir. »

Leur désarroi est à la mesure d’une crise systémique. Nous ne sommes pas en présence d’une simple turbulence du monde de la finance, ou d’un effet de l’amoralité de quelques spéculateurs. Nous voyons se déployer « en grand » les conséquences du fonctionnement même d’un système. Un système qui a cherché ses débouchés dans la financiarisation et la spéculation. Un système qui a simultanément intensifié le taux d’exploitation du travail, précarisé à tout-va l’emploi et détruit des conquêtes sociales vieilles de décennies. Un système qui a conduit à une répartition des richesses toujours plus inégalitaire : pour ne prendre qu’un exemple, en France, sur 20 ans, 10 points de valeur ajoutée sont passés du travail au capital, soit 170 milliards d’euros chaque année. Et c’est ce système qui a, au final, provoqué de lui-même une rétraction de ses débouchés, amenant à l’éclatement de la bulle financière.

Mon vieux camarade Michel Husson a une excellente formule pour résumer ce processus. Il dit que la satisfaction d’une part croissante des besoins sociaux n’intéresse plus le capitalisme, parce que cette satisfaction implique une baisse de la rentabilité. Dit autrement, la finance a joué le rôle de déversoir de profits qui ne sont plus investis dans la sphère réelle. Nous sommes là, tout simplement, en présence d’une de ces crises de suraccumulation de capital annoncées en son temps par le vieux Marx…

Et tous ces experts, tous ces gouvernements, qui nous ont amenés là où nous sommes présentement, réagissent comme ils savent seulement le faire : en se comportant en pompiers pyromanes. Ils restent dans les clous de la concurrence effrénée et de la rentabilité. Ils continuent à faire du travail la variable clé de l’économie. Ils veulent faire baisser encore les salaires. Ils poussent les feux des suppressions d’emplois, des délocalisations, des fermetures d’entreprises, du démantèlement de la protection sociale. Ils veulent, toujours et toujours, privatiser tout ce qui peut être source de profit, l’éducation la santé, les loisirs… En procédant de cette façon, non seulement ils se révèlent incapables de coordonner leurs efforts, non seulement ils créent entre eux de nouvelles oppositions d’intérêt – elles vont à présent, l’avez-vous remarqué, jusqu’à menacer d’éclatement l’Union européenne elle-même -, mais ils jettent eux-mêmes les bases de nouvelles crises, encore plus graves. Ainsi, lorsqu’ils distribuent comme ils le font des milliards aux banques, lorsqu’ils inondent le marché de liquidités, ils alimentent la prochaine bulle financière. Laquelle ne mettra pas longtemps à éclater à son tour. Avec des conséquences encore plus dramatiques pour les populations.

Amis et camarades, prenons-en toute la mesure : l’humanité se trouve une nouvelle fois confrontée au spectre de la barbarie. C’est Jaurès qui disait que le capitalisme portait en lui la guerre comme la nuée porte l’orage. Si une alternative de rupture ne se fraie pas rapidement un chemin, alors, cette crise peut parfaitement se dénouer dans le déchaînement des concurrences entre nations et multinationales pour un nouveau partage des marchés. Dans le resurgissement des barbaries guerrières et des chauvinismes meurtriers. Dans la renaissance des populismes autoritaires et des tentations fascisantes. Déjà, le G 20 de Londres se trouve suivi du sommet de Strasbourg, qui va initier le redéploiement de cette alliance guerrière, sous domination des États-Unis, qu’est l’Otan dont Sarkozy veut réintégrer le commandement militaire. Déjà, en Grande-Bretagne, le parti d’extrême droite est annoncé comme le grand bénéficiaire du scrutin de juin prochain, grâce à sa campagne xénophobe sur le thème : « Les emplois britanniques aux Britanniques ! »

Affirmer une alternative de rupture

La question n’est donc pas de « moraliser » un capitalisme par définition sans autre morale que la recherche du profit le plus important possible pour l’actionnaire. Elle est de porter le fer au cœur de la logique qui menace de faire s’effondrer l’économie mondiale et d’entraîner, purement et simplement, la civilisation dans le chaos.

Nous rencontrons là, vous l’avez compris, l’enjeu décisif des prochaines élections européennes.

L’alternative ne viendra pas du Parti socialiste. Lorsque je parle du Parti socialiste, je veux bien évidemment parler de ses dirigeants, pas de ses militants et de ses électeurs qui ont majoritairement, avec nous, en 2005, dit « non » au traité constitutionnel européen.

Précisément, je lisais l’autre jour, dans un grand quotidien national, qu’une intense réflexion agitait les sphères dirigeantes de ce parti. Un instant je me suis demandé si, par hasard, cela concernerait le dépôt d’une proposition de loi visant, par exemple, à interdire les licenciements boursiers. Naturellement, il ne s’agissait pas de cela… Il est vrai que cela aurait constitué un authentique séisme politique : vous vous souvenez certainement que, lorsqu’un des responsables du PS (c’était Benoît Hamon) osa, il y a peu, évoquer le possible rétablissement de l’autorisation administrative de licenciement, il reçut une véritable volée de bois vert de la part de ses camarades qui le crurent en proie à une dérive quasi-bolchevique…

Non ! Le sujet de la « grande réflexion » en cours concernait l’organisation de « primaires » destinées à désigner le candidat socialiste pour 2012. On a recensé 80 000 chômeurs de plus au mois dernier, soit 3000 nouveaux chaque jour ; Sarkozy lui-même admet maintenant que l’on va probablement vers le million de sans-emploi supplémentaire cette année ; trois millions de salariés ont clamé leurs angoisses et leurs attentes le 19 mars dans la rue… Et la haute direction du PS réfléchit… à celui ou celle qui pourrait le représenter en 2012.

En vérité, les états-majors de tous les partis de la social-démocratie européenne sont désormais allés bien trop loin dans la soumission à la loi du marché, pour en revenir à une logique de confrontation aux intérêts du capital. C’est si vrai que Martine Aubry – tout comme, d’ailleurs, sa rivale Ségolène Royal – va, pour le scrutin du 7 juin, nous vanter les mérites du traité de Lisbonne… Ce traité qui enfonce dans le marasme toutes les économies européennes en interdisant, entre autres, les aides publiques et toute harmonisation sociale ou fiscale…

Cela dit, il nous faut, nous-mêmes, faire preuve de lucidité. L’alternative, nous ne la portons pas encore. Dès lors que la gauche de transformation est éparpillée, elle n’incarne pas un espoir crédible. C’est ainsi ! Aucune des forces qui se revendiquent de la rupture avec l’ordre capitaliste et libéral ne peut, à elle seule, ouvrir la voie au changement. C’est la raison pour laquelle le rassemblement est une ardente nécessité… et que le Front de gauche est présentement le seul à y apporter une réponse.

Un vote, quatre messages

De fait, ce 7 juin, il va être possible, par un seul vote, de délivrer quatre messages :

  • changer de pouvoir ;
  • changer de politique ;
  • changer d’Europe ;
  • changer de gauche.

Changer de pouvoir, tout d’abord : parce qu’il n’est pas possible de laisser Sarkozy pérorer, comme il l’a fait récemment devant ses amis, qu’il a « la banane ». Sa formule transpire la haine de classe. Notre petit monarque a choisi la voie de la confrontation avec le mouvement social. Dans ces conditions, par un vrai vote de gauche, pas un vote en demi-teinte, pas le vote du moindre mal, il s’impose de prolonger sur le terrain directement politique ce que grévistes et manifestants du 19 mars ont dit avec la force que vous savez : « Casse-toi, pôv con ! »

Changer de politique, ensuite : parce qu’il faut bien traduire en propositions fortes ce qu’ont demandé les millions de travailleurs dans les rues, le 19 mars. Ils ont dit : « Il faut augmenter les salaires, les minima sociaux, les pensions » ; ils ont dit : « Le SMIC à 1500 euros net, 300 euros immédiatement pour tous les salaires ! » Pour cela, il n’est qu’une méthode : prendre sur les profits, interdire purement et simplement les stock-options, les bonus et autres parachutes dorés. De la même manière, grévistes et manifestants, à commencer par ceux des entreprises que l’on ferme ou que l’on soumet à de brutaux plans de licenciements, disent quotidiennement qu’ils ne veulent plus voir l’emploi transformé en variable d’ajustement d’une crise dont ils ne sont pas les responsables. En votant vraiment à gauche, le 7 juin, il doit être possible d’exiger l’interdiction des licenciements dans les entreprises qui font du profit, la récupération des subventions publiques accordées à ces patrons qui les ont empochées sans que cela ait la moindre conséquence sur l’emploi, l’arrêt des suppressions de postes dans la fonction publique. Dans le même registre, chaque jour s’exprime la volonté que s’arrêtent les privatisations, que l’on permette aux services publics d’assumer leurs missions. Ce 7 juin, il sera possible de se prononcer pour cet objectif réellement de gauche qui considère que seul l’intérêt général doit déterminer les politiques publiques. Si je voulais résumer ce deuxième message, nous allons tout simplement défendre une politique qui reprend à son compte cette magnifique formule de la Constitution révolutionnaire de 1793 : le droit à l’existence du plus grand nombre passe avant le droit de propriété de l’infime minorité de parasites qui possède déjà tout !

Changer d’Europe ; parce que c’est indispensable. Pas plus hier face à la mondialisation du capital, la réponse à une crise globalisée ne peut aujourd’hui venir du seul cadre des nations. L’Europe peut être un cadre pertinent pour affronter les défis colossaux du moment. À condition qu’elle rompe résolument avec une construction qui discrédite, dans la conscience des peuples, l’idée européenne elle-même. Nous avons besoin d’une Europe qui s’émancipe de ses traités synonymes de destruction des droits sociaux et de régression démocratique, à commencer par ce traité de Lisbonne qui a recyclé l’ensemble des dispositions du traité constitutionnel et que l’on a imposé à la hussarde – n’oubliez pas de rappeler autour de vous que c’est Sarkozy qui a revendiqué la paternité de cette méthode – aux citoyens de tout le continent. Nous avons besoin de l’Europe d’un bouclier social, qui protège le monde du travail de la tourmente financière et de l’économie casino. Nous avons besoin de l’Europe de l’interdiction des licenciements et des délocalisations, du SMIC européen, du retour au service public. Nous avons besoin d’une Europe de la réappropriation publique du système bancaire et de crédit, afin de disposer des moyens de réorienter l’économie. Nous avons besoin d’une Europe de la redistribution des richesses au bénéfice du plus grand nombre. Nous avons besoin d’une Europe de la planification écologique, car la course à la rentabilité et le productivisme sont en train de détruire littéralement la planète. Nous avons besoin de l’Europe d’une nouvelle politique agricole commune, qui prenne le parti des petits agriculteurs contre les multinationales de l’agro-alimentaire : vous connaissez toute l’importance d’un tel objectif dans votre département et vous savez à quel point il est lié à la question des services publics. Nous avons besoin de l’Europe du respect des droits des femmes, et tout particulièrement de leur droit à disposer de leur corps, de l’Europe d’un bouclier laïque permettant de soustraire le continent à l’influence de ce nouvel obscurantisme qui excommunie à tout-va, jusqu’à des fillettes que le Vatican considère « coupables » d’avoir été violées… Nous avons besoin de l’Europe de l’égalité des droits pour tous ses résidents, et singulièrement de la régularisation des sans-papiers. Nous avons besoin d’une Europe de la démocratie, non celle des petits cénacles qui agissent en toute opacité, mais celle des peuples décidant souverainement de la construction politique qu’il veulent pour eux. Nous avons besoin de l’Europe de la paix et du co-développement, donc d’une Europe qui renonce aux ingérences impérialistes et néocolonialistes, qui sorte de l’Otan, qui retire toutes ses troupes des théâtres d’opération où elles se trouvent engagées, de l’Irak à l’Afghanistan.

Changer de gauche enfin : parce que c’est l’urgence des urgences. On me dit souvent que l’important, ce sont les luttes. C’est tout à fait vrai. Sans rapport de force social, jamais ne s’ouvrira le chemin d’une autre société. Reste qu’actuellement, les luttes viennent précisément se heurter à l’absence de débouché politique à leurs revendications et à leurs aspirations. La force de Sarkozy et de Parisot, leur unique atout devrais-je même dire, vient de vide sidéral à gauche. Or, il n’y a pas de fatalité à cette situation. Le 29 Mai, une majorité d’électeurs socialistes, communistes, écologistes, d’extrême gauche n’a pas seulement rejeté le projet de constitution libérale pour l’Europe ; elle s’est prononcée pour que la gauche cesse enfin de s’incliner devant les puissances d’argent. Divisée, la gauche de transformation est menacée de se voir réduite à une addition de nains politiques. Rassemblée, sur un choix de société qui tranche avec les politiques qui ont mené le monde à l’abîme, cette gauche de transformation peut renverser la table ! Elle peut devenir majoritaire à gauche ! Et alors, chacun le sait, tout changera dans ce pays !

Vous comprenez pourquoi ni mes amis, ni moi, ne pouvions manquer à l’appel du Front de gauche. Vous comprendrez également pourquoi je veux profiter de l’occasion de ce beau meeting de Castelsarrasin, pour lancer un nouvel appel à l’unité.

À toutes les composantes de la gauche alternative qui, comme moi, n’ont eu de cesse de se battre pour le rassemblement d’une gauche sociale et écologique ; aux écologistes de gauche, qui ne peuvent se résigner à voir Daniel Cohn-Bendit dissoudre leurs valeurs transformatrices dans une soupe de plus en plus centriste et de moins en moins sociale ; aux socialistes, qui furent, avec nous, du côté du « non » antilibéral de 2005 ; aux actrices et acteurs du mouvement social, aux hommes et aux femmes de gauche, qui savent à quel point il est décisif de lier unité dans les luttes et unité sur le terrain politique si l’on veut arrêter la marche à la catastrophe : je veux dire que c’est le moment de s’engager, sans réserves et sans autre préalable que le respect des identités de chacun. Partout, formons ensemble des comités de campagne pluralistes. Avec le souci scrupuleux de l’indépendance des organisations du mouvement social, apportez toutes et tous, au pot commun, l’expérience de vos engagements de terrain, dans toute leur diversité… Nous avons besoin de vous, vous avez besoin que change la donne politique…

Enfin, à Olivier Besancenot, à mes camarades du NPA, aux sympathisants et aux électeurs du nouveau parti, je veux m’adresser avec gravité. Nous allons, dans cette campagne, dire les mêmes choses ; nous sommes ensemble dans les mobilisations, unis sur des exigences communes… Allons-nous nous présenter devant celles et ceux qui souffrent de trop d’injustices subies et d’inégalités imposées avec, entre nos mains, des bulletins de vote concurrents ? Ce serait tout simplement irresponsable ! Ce serait le message du désespoir ! Vous ne pouvez prendre la responsabilité de le délivrer ! Vous nous dites, mes camarades du NPA, vouloir un « front durable », qui aille au-delà de l’échéance de ces européennes. Cela tombe bien, moi aussi… Mais pour que ce front devienne effectivement « durable », il vaudrait mieux éviter de le détruire à la première occasion qui se présente ! Cessons donc les faux prétextes, les arguments de circonstance, et répondons ensemble à l’appel de celles et ceux au nom desquels nous nous battons. Jusqu’au dernier moment, je vous le redis, jusqu’à l’ultime instant où il s’agira de déposer officiellement les listes, la porte restera ouverte.

Chers Amis, Chers Camarades, nous disposons de deux atouts essentiels : notre détermination à défendre une vraie politique de rupture, l’esprit de rassemblement que nous serons seuls à symboliser au sein de la gauche. Il nous appartient à présent de convaincre autour de nous ! De combattre l’abstention, le désintérêt, la résignation, le scepticisme ! De montrer en quoi le bulletin du Front de gauche sera le seul vote utile de ces élections ! Ensemble, nous allons y parvenir !

Christian_Picquet

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