La France à un tournant

Bon… Encore une semaine de campagne… Celle qui vient de s’achever aura de nouveau charrié son lot de bonnes nouvelles (pour celles et ceux qui, comme moi, ont longtemps ramé à contre-courant, cela en deviendrait presque lassant !)… Je ne parle pas seulement des sondages (l’un d’entre eux mit même Jean-Luc à 17%), car il faut toujours observer la plus extrême prudence à leur endroit : les résultats d’un vote se mesurent à la seule aune de ce qu’une bataille électorale aura permis de faire bouger dans la société et dans les consciences, non à des enquêtes d’opinion relevant bien trop souvent de la technique du « doigt mouillé », ou peu s’en faut… Je me fie, d’abord et avant tout, à cet élan qui nous porte et dont j’ai, chaque soir ou presque, la spectaculaire confirmation…

Jeudi 12, j’étais ainsi à Besançon, invité à animer la dernière des assemblées citoyennes du Front de gauche de la ville sur le thème : ”« Qu’est-ce qu’une politique de gauche ? »”. La réunion réunit un public encore plus nombreux que la précédente, à laquelle avait été convié Francis Wurtz. Et, le lendemain, j’étais à Gap, pour le meeting départemental du Front de gauche, l’occasion pour moi de rencontrer l’ami Philippe Cottet, figure du mouvement social sur les Hautes-Alpes, qui a récemment rejoint Gauche unitaire. De l’avis de tous les militants aguerris que j’y aurai croisés, ce fut du jamais vu, pour un meeting politique dans cette ville : 450 personnes.

Voilà qui me conforte dans une intuition que j’ai déjà fait partager à mes camarades de la direction de Gauche unitaire, et que je voudrais aujourd’hui vous livrer : cette élection présidentielle pourrait bien représenter un point tournant de la situation française. Le succès de la campagne organisée autour de Jean-Luc, l’écho des propositions que nous avons installées dans le débat public, la dynamique militante qu’enregistre la moindre de nos réunions ou assemblées citoyennes disent quelque chose de l’état du pays. Je sais bien que des foules assemblées ne produisent pas mécaniquement un score, que l’impact d’un discours et d’un positionnement, surtout dans la manière dont il est traduit médiatiquement, s’avère fréquemment de nature à déformer la perception de la réalité. Les plus anciens ne manqueront ainsi pas de me rappeler leurs douloureuses expériences.

Un Georges Marchais, en 1981, conduisit par exemple une impressionnante campagne, qui reste encore dans les mémoires des militants communistes de l’époque, avant d’enregistrer le premier recul majeur de l’influence électorale du PCF. Mes amis de République et socialisme, de la même façon, évoqueront sans doute avec moi la percée dont la candidature de Jean-Pierre Chevènement était créditée dans les sondages, jusqu’à ce qu’elle parvienne tout juste à franchir la barre des 5%, un certain 21 avril 2002. Les uns et les autres auront toujours raison de nous inviter à la plus extrême prudence. À cette nuance près que les échecs en fin de compte subis par ces deux candidatures ne sauraient être dissociés des lourdes fautes qui auront mené à ces épilogues. Pour le secrétaire général d’alors du Parti communiste, l’incapacité à définir une ligne de conduite échappant, à la fois, à la subordination envers une social-démocratie conquérante, et au piège de la division de la gauche (à un moment où le peuple de gauche voulait, plus que tout, se débarrasser de Giscard d’Estaing). Pour le président du Mouvement républicain et citoyen, l’illusion mortelle que la République transcendait le clivage droite-gauche, couplée à la volonté de réunir autour d’une inexistante vision commune de la nation jusqu’à des secteurs venus de l’extrême opposé de l’échiquier politique. Ce qui constitue la nouveauté de la belle aventure initiée, en 2009, avec la formation du Front de gauche, permet d’envisager l’avenir sous de bien meilleurs auspices.

C’est à un mouvement s’exprimant au plus profond de la société que nous avons permis de (re)surgir. Pour la première fois depuis au moins quinze ans, une large fraction du peuple éprouve le sentiment qu’elle a retrouvé la gauche qu’elle imaginait avoir perdue au fil d’alternances s’étant achevées sur d’authentiques désastres. Des acteurs de première importance de ce qu’il est convenu d’appeler le « mouvement social » reprennent le chemin de l’action politique, après s’être longtemps repliés sur leurs engagements syndicaux ou associatifs. Des jeunes, en grand nombre, sentent qu’un autre devenir peut s’ouvrir à eux et à la France. À la grande surprise de beaucoup, le rejet massif dont l’ordre libéral fait l’objet conduit à présent des électeurs à faire le choix de la gauche sans passer par la case du modérantisme en lequel le candidat socialiste croyait avoir trouver sa martingale gagnante. Trop d’éléments convergents pour que l’on n’en conclue pas à une lame de fond…

QUAND LA RÉALITÉ REPREND LE DESSUS…

Comme l’écrit, plutôt justement, le politologue Pascal Perrineau dans son dernier ouvrage, ”Le Choix de Marianne” (aux éditions Fayard), ”« les frontières politiques auxquelles les Français s’étaient habitués se sont déplacées, volatilisées, recomposées »”. Bien vu ! À ceci près qu’il convient d’identifier précisément ce qui provoque un basculement de nature à engendrer, au-delà du double scrutin de cette année, une onde de choc à l’échelle nationale autant qu’à celle de l’Union européenne. De fait, pour peu que l’on voulût bien en observer les innombrables signes avant-coureurs, le pays réel affiche depuis fort longtemps un profond décalage avec sa représentation officielle. À quatre reprises depuis dix-sept ans, d’immenses mobilisations auront révélé qu’une majorité de Français s’opposait aux politiques de casse sociale dont elle est la victime, et qu’elle manifestait à l’inverse son viscéral attachement à ce qui fonde, depuis les origines, l’exception républicaine française.

D’aucuns, par trop « boboïsés » ou simplement aveuglés par la nostalgie du gauchisme post-soixante-huitard – dont la faillite renvoie à son impuissance à prendre en considération les véritables leçons de décennies de luttes de classes -, ont cru intelligent de moquer (ou d’ignorer avec mépris) ce souci de défendre des conquêtes apparaissant au plus grand nombre comme des digues face à l’avidité sans bornes des actionnaires, des banquiers ou des fonds de pension. Pourtant, sans l’arrimage à cet héritage complexe (celui, pour être précis, de la Grande Révolution, des batailles de défense de la République devant les assauts répétés des classes possédantes, du programme du Conseil national de la Résistance…), les soulèvements sociaux de 1995, 2003 ou 2010, en défense du service public ou du droit à la retraite (sans parler de l’irruption de la jeunesse scolarisée contre un CPE remettant en question des acquis essentiels de la législation du travail autant que le principe d’égalité des droits), n’auraient pu exprimer un contenu politique si élevé.

Sauf que ces gigantesques confrontations – rappelant quelque part Mai 68 par la massivité de l’entrée en lice du salariat, la grève générale en moins… – ne trouvèrent jamais, sur la théâtre politique et électoral, une traduction à la mesure des aspirations qu’elles avaient révélées en creux. Les diverses tentatives de construire « à chaud » un prolongement politique à la lutte sociale échouèrent l’une après l’autre, à l’instar des « États-généraux du mouvement social » initiées en 1996 par le regretté Pierre Bourdieu. Sauf pour celles de 1995 et 2006, dès lors qu’elles se révélèrent orphelines de débouché, les mobilisations ne trouvèrent pas en leur sein la force de tenir l’épreuve de force de longue durée qui eût seule pu mettre en échec la droite et les libéraux. Quant à l’espoir qu’un vote par défaut, se portant sur les solutions d’alternance successivement incarnées par Lionel Jospin et Ségolène Royal, pourrait permettre au mouvement populaire de prendre sa revanche, il eût tôt fait de se voir brisé, comme l’on sait…

Une opportunité se présenta bien, une fois, de faire confluer les exigences portées par la rue et les grèves avec une réponse politique. Elle surgit en 2005, avec la campagne du « non » de gauche au traité constitutionnel européen et le rejet majoritaire de ce projet visant à graver dans le marbre la condamnation des peuples au libéralisme perpétuel. Elle ne sut néanmoins se concrétiser lors du scrutin présidentiel suivant, entraînant le double échec des forces affichant l’objectif de donner un nouvel horizon à la gauche (électoralement marginalisées du fait de leurs concurrences délétères) et, par suite, de la gauche tout entière.

La spécificité de 2012 vient de la réapparition d’une force qui entend porter les exigences nées des luttes. Parce que cette force aura su, tout à la fois, réunir les courants disponibles sur le programme de la rupture avec l’ordre établi et afficher une ambition majoritaire, dans le camp progressiste comme pour le pays, elle aura fini par catalyser une volonté de changement restée, jusque-là, éparpillée. Surtout, elle sera parvenue, si ce n’est à effacer, du moins à dépasser les plus lourds effets de l’échec enregistré par le mouvement de 2012 en défense de la retraite à 60 ans.

D’où l’étiage atteint par le candidat du Front de gauche à la présidentielle. D’où, plus encore, l’élan qui entraîne sa campagne et trouve ses prolongements jusque dans la moindre des réunions organisées dans les coins les plus reculés de l’Hexagone. D’où, bien sûr, l’implication croissante de syndicalistes et d’acteurs associatifs dans une épopée militante qui fait renaître l’intérêt de très nombreux citoyens pour la politique. D’où, enfin, les turbulences que connaissent les campagnes des quatre candidats qui semblaient, au départ, devoir jouer seuls la partie et reléguer les autres à la marginalité : si elle se confirmait, la défaite de Nicolas Sarkozy s’expliquera par cette sourde insurrection antilibérale à laquelle notre Front de gauche aura donné la plus remarquable des impulsions ; dans le même temps, pour peu qu’elle se concrétisât, la victoire annoncée de François Hollande devra moins à l’impact propre de sa campagne qu’à la dynamique de notre percée, dont les retombées bénéficient à toute la gauche ; confronté à une force décidée à l’affronter sans concession, le national-frontisme aura vu déstabiliser son entreprise de conquête des classes populaires ; et les tentatives réitérées de Monsieur Bayrou pour recomposer le jeu politique au centre se seront finalement abîmées sur la revitalisation du clivage droite-gauche, dont nous aurons été les principaux artisans.

UNE BRÈCHE EST EN TRAIN DE S’OUVRIR

Voilà donc la perspective d’une défaite de la droite se profiler au point de rencontre de deux tendances lourdes : un rapport de force électoral qui voit notre camp retrouver (du moins, à ce stade, dans les sondages) l’un des plus hauts niveaux qu’il ait enregistrés depuis 1981 ; la percée, en son cœur, d’un courant ascendant qui lui insuffle l’esprit de rébellion et de résistance ayant inspiré toutes les confrontations sociales de ces dernières années, des explosions centrales que j’ai déjà évoquées aux luttes d’entreprise défrayant régulièrement la chronique pour les salaires ou l’emploi.

François Hollande peut bien s’en aller répétant, comme il vient encore de le faire devant la rédaction de ”Libération”, ce 13 avril, que le choix de l’austérité sera incontournable aux premiers temps de son quinquennat, oubliant au passage que la crise et l’endettement de l’État sont d’abord la résultante des désordres engendrés par un capitalisme financier enivré par sa cupidité (”« Il n’y a pas de rigueur que je proclame,” disait-il.” Il y a tout simplement le redressement. On ne peut pas vivre avec une dette publique qui a les conséquences que l’on sait »”). Sa victoire, le 6 mai, s’il venait à être placé en tête de la gauche au soir du premier tour, ne ressemblerait pas aux précédentes arrivées de la gauche aux affaires. Elle pourrait, au contraire, ouvrir une brèche au travers de laquelle le mouvement populaire aurait ensuite à s’engouffrer pour faire valoir ses revendications.

Dit d’une autre manière, et sans céder à la tentation de l’analogie historique, la conjoncture présente quelques similitudes avec 1936. Lorsque, à une victoire dans les urnes du Front populaire sur un programme des plus timorés (il portait l’empreinte du Parti radical), succéda la grève générale sans laquelle les congés payés seraient, par exemple, restés un rêve pour encore bien des années. Il est, à cet égard, étonnant de voir aujourd’hui d’éminentes figures intellectuelles, à l’instar d’un Jacques Julliard pourtant grand connaisseur de l’histoire du mouvement ouvrier, écrire qu’ils se méfient des” « enthousiasmes collectifs tels qu’on les pratiquait dans l’Allemagne nazie et la Russie soviétique »” (in ”Marianne” du 7 avril). Comme si la gauche n’avait pas toujours tiré sa force desdits ”« enthousiasmes collectifs »” qui peuvent seuls briser l’arrogance des puissants, et comme si, à l’inverse, elle n’avait pas vu ses plus cinglantes défaites se préparer dans la passivité ou le désabusement des citoyens et du monde du travail.

UNE CONFRONTATION MAJEURE SE DESSINE

En écrivant cela, je me vois amené à m’arrêter un instant sur… le grand retour des marchés sur le théâtre européen. Nicolas Sarkozy, François Fillon et les bouches à feu de l’UMP auront donné le ton en appelant à la rescousse les investisseurs, et en allant jusqu’à menacer la France d’une offensive spéculative sans précédent si elle osait se débarrasser de leur emprise. À son tour, ”Le Monde” du 13 avril embrayait, fidèle aux tropimes néolibéraux de ses directions depuis quelques années, en titrant l’un de ses papiers : « Qu’il soit de droite ou de gauche, la Bourse veut un président qui réforme. » ”« La Bourse »” ? Hallucinante personnification de ce pouvoir invisible autant que tentaculaire auquel le quotidien vespéral donnait toutefois une silhouette un peu plus précise dans le corps de l’article : ”« Les Anglo-Saxons, qui constituent plus de la moitié des investisseurs du CAC 40, se montrent de plus en plus agacés par les circonvolutions de la campagne française, trop éloignée, à leur goût, des grands enjeux financiers du moment. »”

Ceux d’en face savent décidément mettre les points sur les « i ». Ils ne renoncent à aucun moyen de pression pour tenter d’empêcher les peuples d’exercer leur souveraineté. En l’occurrence, pour empêcher que le congé signifié à notre Prince élyséen ne vienne briser le carcan « austéritaire » dans lequel ils veulent enfermer définitivement l’Europe, et plus encore que l’événement ne favorise la convergence des révoltes populaires contre des politiques entraînant chaque pays dans une récession mortifère. Élu, le candidat socialiste se passerait de lui-même le cou dans le garrot, s’il croyait alors possible de composer avec la sainte-alliance des gouvernements conservateurs et des élites libérales, s’il s’employait à prêcher la « paix sociale » au monde du travail. Tel Léon Bum, qui fut contraint de quitter la présidence du Conseil après être parvenu à faire rentrer dans son lit le torrent qui avait auparavant vu la classe ouvrière forcer la porte du changement.

LES CHOIX DE L’APRÈS-6 MAI

Devant des enjeux aussi considérables, je reste pour le moins confondu par la légèreté avec laquelle Philippe Poutou, Olivier Besancenot ou Alain Krivine semblent vouloir aborder l’après-présidentielle. Si je me félicite de les entendre enfin tenir quelques propos unitaires à l’endroit du Front de gauche, mieux vaut tard que jamais, je trouve assez frivole d’en appeler, comme ils le font d’ores et déjà (avant même que la bataille des deux tours de la présidentielle ait fini d’être livrée), à un bloc d’opposition de gauche au gouvernement que constituerait un François Hollande sorti vainqueur de l’affrontement électoral avec la droite. Derrière la posture, qui ne devine l’envie de diviser le Front de gauche, à partir de l’analyse fallacieuse selon laquelle la composante communiste de ce dernier serait inexorablement, quelles qu’en fussent les conditions, attirée par les ors des palais officiels ?

Parlons sans détours. Il est absolument normal que la question gouvernementale fît l’objet d’un débat dans notre rassemblement. Nous n’en avons pas moins défini en commun, dans un document ayant servi de base à la désignation de Jean-Luc Mélenchon comme notre candidat, le cadre dans lequel nous chercherions à apporter une réponse à cette question d’importance. Parvenir, comme nous venons de le faire, à cristalliser une vague d’adhésion à notre démarche de refondation de la gauche, confère des responsabilités exceptionnelles. S’il ne saurait s’agir de trahir les attentes de celles et ceux qui se seront prononcés en notre faveur, nous ne saurions davantage nous réfugier dans l’incantation impuissante qui a mené le Nouveau Parti anticapitaliste ou Lutte ouvrière aux impasses que l’on voit.

Nous l’avons dit à de nombreuses reprises, nous entendons réunir les conditions d’une majorité et d’un gouvernement agissant au service de l’intérêt général, contre les banques, les actionnaires et les spéculateurs. La montée en puissance du Front de gauche est, en ce sens, l’indication de ce à quoi aspire le peuple de gauche, même si le réflexe du « vote utile » ne permet pas, i”n fine”, à notre candidat de se sélectionner pour le second tour. Les dirigeants socialistes se devraient donc, logiquement, d’enregistrer que le schéma sur lequel ils ont basé leur stratégie de reconquête du pouvoir est irréversiblement caduc. François Hollande reste cependant sourd à cette problématique. Il vient encore de le réaffirmer, dans son interview à ”Libération”, récusant l’idée de discuter, avec les autres composantes de la gauche, d’un programme de nature à rassembler largement dès lors qu’il prendrait en considération les véritables attentes de l’électorat populaire. Que l’on n’attende pas de nous, en conséquence, que nous nous renions, en sacrifiant les propositions portées devant le pays sur l’autel de l’austérité.

Dans la mesure où notre approche se construit sur le long terme, bien au-delà des rendez-vous des urnes de ce printemps, parce que nous sommes aussi convaincus que nos idées tendent à devenir majoritaires dans la gauche, notre feuille de route est toute tracée. Non nous placer dans l’attitude stérile consistant à proclamer une opposition de principe au Parti socialiste, mais travailler à ouvrir une perspective positive au mouvement qui aura abouti, du moins l’espérons-nous, à la défaite de la droite. Nous situer, dit autrement, aux avant-postes du combat que le peuple devra, avec ses propres méthodes de combat, la reprise de la rue et la grève, livrer pour mettre en échec le monde de la finance et arracher de nouvelles et belles conquêtes sociales ou démocratiques. Construire, à cette fin, avec toutes les forces qui s’y montreront disposées dans la gauche, d’où qu’elles viennent, les rassemblements majoritaires à même d’agir dans cette direction.

Le poids du Front de gauche à l’élection présidentielle sera, naturellement, un atout essentiel. Plus il sera important, plus les chances de réussite seront au rendez-vous. Mais le scrutin qui suivra immédiatement, celui des législatives, n’aura pas moins d’importance. Si des députés de notre rassemblement, en grand nombre, disposaient de fortes capacités de peser sur la majorité future de l’Assemblée nationale, leur action représenterait une aide précieuse à la plus large implication populaire autour de mesures visant à une transformation profonde des conditions de vie du plus grand nombre de nos concitoyens.

En 1936, le leader de la gauche socialiste de l’époque, Marceau Pivert, avait proclamé : ”« Tout est possible ! »” Sans reprendre exactement cette maxime, réalisme et prudence obligent, ce qui se joue incontestablement, dans cette dernière semaine de la campagne, n’est cependant rien d’autre que la réouverture du champ des possibles pour la gauche. Ce n’est pas rien…

PS. DEUX FLAMMES DE RÉSISTANCE SE SONT ÉTEINTES. La semaine passée, auront disparu deux figures à jamais attachées aux idées de résistance et de lutte pour la liberté. Raymond Aubrac, aux côtés de son épouse Lucie, disparue avant lui, n’aura jamais abdiqué d’un seul des principes qui les avaient tous deux conduits à défier l’occupant hitlérien. J’avais eu l’occasion de les croiser, bien des années après cette sombre période, dans de grandes batailles (comme le lancement de Ras-l’Front aux heures dangereuses où Le Pen-père semblait promis à une irrésistible ascension) ou dans le lancement de divers appels. En compagnie de Raymond, n’hésitant pas à exciper de sa judéité lorsque l’essentiel était en jeu, j’avais encore eu l’occasion de m’élever contre les prétentions du pouvoir israélien en place à légitimer la colonisation des territoires palestiniens au nom des Juifs du monde entier. Le nom de Ahmed Ben Bella, quant à lui, résonnera toujours comme le symbole du combat pour la liberté du peuple algérien. Il avait été victime des premiers soubresauts de cette révolution, au point de connaître la prison puis l’exil. C’est à cette occasion que j’avais eu l’occasion de le connaître et de participer avec lui, quoique nos options idéologiques fussent loin d’être identiques, à diverses initiatives de solidarité internationale. L’esprit d’indignation, si bien célébré par Stéphane Hessel, est aujourd’hui en deuil.”

Christian_Picquet

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