Le nouvel appel de la Bastille

Le soleil brillait sur Paris ce 5 mai… Comme une lueur au cœur d’un printemps aussi désespérant que l’état d’une France saignée à blanc par l’austérité qui lui est imposée depuis trop longtemps… Comme un signe, aussi, que quelque chose de neuf était en train de naître de la déferlante citoyenne initiée par le Front de gauche, avant que ne la rejoigne des secteurs d’autres formations de la gauche (au premier rang d’entre eux, un contingent d’Europe écologie-Les Verts avec Eva Joly), des structures et des acteurs du mouvement syndical ou associatif, des citoyens qui ne supportent plus de voir ignorer le sens de leur vote du printemps 2012… Comme un encouragement à poursuivre la dynamique de remobilisation et de contre-offensive qu’entendait amorcer cette marche joyeuse, jeune, dynamique, combative et, surtout, déterminée à ne ”« rien lâcher »” des principes et exigences qui n’ont pas cessé de battre au cœur de la gauche et du camp du travail.

Quel contraste avec la « bunkerisation » dont Jean-Marc Ayrault donnait, au même moment, l’image piteuse en renonçant à se rendre auprès des siens, les jeunes socialistes réunis dans les Landes pour célébrer le premier anniversaire de la victoire sur Nicolas Sarkozy. Quel contraste, surtout, avec l’autisme dont les deux têtes de l’exécutif faisait preuve en ajoutant de nouveaux cadeaux à ceux déjà distribués aux entrepreneurs, ou en annonçant le désengagement de l’État d’un certain nombre d’entreprises publiques. François Hollande s’arcboute sur son « socialisme de l’offre » quand chacun sait que, partout où il fut mis en œuvre, il ne sera parvenu qu’à conforter les logiques de rendement financier de court terme constituant le moteur réel du capitalisme d’aujourd’hui.

Bref, en ce premier week-end de mai, galvanisés par une participation très supérieure à celle de la marche du 18 mars 2012, celle-là même qui avait été le premier des temps forts de notre campagne de la présidentielle, nous aurons en quelque sorte sonné l’heure du réveil de la gauche. Exprimé qu’un changement de cap radical était indispensable. Dessiné les contours de celui-ci : un nouveau modèle de développement, donnant la priorité à la satisfaction des besoins sociaux et se dotant des moyens nécessaires à son déploiement grâce à la mise sous contrôle public du système financier et à une redistribution des richesses que permettrait une authentique révolution fiscale ; la refondation de la République, grâce à la convocation d’une Assemblée constituante à travers laquelle les citoyens pourraient trouver les moyens d’exercer leur souveraineté aujourd’hui piétinée par une oligarchie rapace ; la réorientation de l’Europe, en commençant par remettre sa Banque centrale sous le contrôle des États afin que l’euro, d’outil d’asservissement des peuples devienne un instrument au service d’un développement écologiquement soutenable. Rappelé l’enjeu capital du moment politique présent : sauver la gauche que les orientations conduites à la tête de l’État mène à une authentique débâcle.

Concluant mon discours place de la Bastille, au même titre que les premières figures politiques de la convergence qui se retrouvait dans la rue, j’aurai conclu par ces mots : ”« Aujourd’hui, nous lançons l’Appel de la Bastille… À tous ceux et toutes celles qui veulent que la gauche soit la gauche, aux militants syndicaux et associatifs, aux citoyens qui ne veulent pas que l’on bafoue leur vote de l’an passé. Nous leur disons : ‘’Il n’est plus temps d’hésiter ! Joignez vos forces aux nôtres ! Ensemble, nous sommes la majorité de la gauche et du peuple ! Ensemble, nous pouvons demain rassembler la gauche et ouvrir la voie à de grandes avancées sociales, démocratiques, écologiques ! Ensemble, nous pouvons imposer une autre majorité et un autre gouvernement pour mener une tout autre politique ! Ensemble, nous pouvons renverser la table, jeter les bases d’un nouveau Front populaire qui mettra en mouvement une force irrésistible à même d’arracher des conquêtes aussi importantes que le furent les congés payés en 1936 !’’ »”

Ce matin, tirant les enseignements du succès de la veille, la coordination nationale du Front de gauche aura en ce sens précisé sa feuille de route. Le 16 mai sera notre nouveau rendez-vous pour appuyer les propositions de loi déposées devant l’Assemblée nationale sur l’amnistie sociale et l’interdiction des licenciements boursiers. Le premier week-end de juin sera ensuite la date où les rues de toutes les villes du pays verront se multiplier rassemblements, marches, initiatives citoyennes sur les mêmes objectifs que le 5 mai. Ce grand rendez-vous sera suivi, le 9 juin, de la marche des femmes contre l’austérité. Avant que ne soient réunies, à Paris, des Assises de la refondation sociale et démocratique de la France où, bien au-delà du Front de gauche, du moins le souhaitons-nous, se retrouveront toutes les forces, sensibilités, personnalités dès à présent disponibles à un vaste débat sur une politique alternative.

Oui, décidément, un processus s’est mis en branle ce dimanche. De ce genre de processus grâce auquel la gauche peut trouver les moyens de se relever et de redevenir le camp du travail. C’est la raison pour laquelle il est à ce point vital que, au cours des semaines et des mois à venir, il se consolide, s’approfondisse, s’élargisse.

Christian_Picquet

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