La présidentielle, les communistes et la reconstruction de la gauche

Ces 11 et 12 décembre, le Parti communiste français aura réuni son conseil national, instance qui constitue en quelque sorte son Parlement. Un rendez-vous très important, qui intervenait alors que la conjoncture pré-électorale française connaît des évolutions particulièrement importantes, à droite naturellement (j’ai déjà eu l’occasion, ici, de m’arrêter sur la gravité de l’extrémisation du camp conservateur), mais également au sein d’une gauche en proie à un mouvement de décomposition aussi spectaculaire que très dangereux. J’aurai introduit cette réunion en analysant, devant mes camarades, les bouleversements politiques en cours, en abordant les débats qui traversent la gauche, en revenant sur la méthode que les communistes proposent pour construire un rassemblement conquérant — et non des opérations aussi bâclées que sans avenir —, en dressant un bilan synthétique de la première phase de la campagne engagée autour de la candidature de Fabien Roussel pour l’élection présidentielle, et en présentant la première version du projet qui sera rendu public au mois de janvier. J’avais, au préalable, coordonné durant plusieurs semaines le travail du groupe en charge de l’écriture de ce dernier. Je reviendrai plus tard sur cette dimension essentielle d’une bataille qui va entrer dans sa phase décisive dès le lendemain du Jour de l’An. Parce que les réflexions à l’oeuvre au sein du PCF intéressent bien au-delà de ses rangs, je publie, ci-dessous, de très larges extraits de mon propos introductif du conseil national.

« Cher.e.s Camarades, nous tenons notre conseil national alors que la France aborde un nouveau moment de son histoire. 

« Un moment d’une gravité extrême, qu’il nous faut analyser avec d’autant plus de soin qu’il imprègne sa marque à la campagne en vue des échéances électorales de l’an prochain.

« La particularité de ce contexte est qu’il conjugue une crise sociale et sanitaire qui ne cesse de s’approfondir, avec une reconfiguration d’ampleur inédite depuis longtemps de la vie politique française.

« Comme l’indiquent les premiers mots de la résolution qui vous est soumise, la France se prépare à entrer dans une nouvelle année, en état de souffrance et d’angoisse aggravées.

UNE FRANCE EN ÉTAT DE SOUFFRANCE ET D’ANGOISSE

« Les hausses des prix de l’énergie et des produits de première nécessité éclairent crûment le niveau indigne des salaires, allocations  et pensions que perçoit une majorité de nos concitoyennes et concitoyens. Et ce n’est pas le « chèque inflation » dont une partie de la population s’est vue gratifiée de la part du pouvoir macronien qui permettra aux personnes concernées de boucler leurs fins de mois. 

« Dans le même temps, le chômage et la précarité demeurent le quotidien de millions d’hommes et de femmes, les délocalisations continuent à ravager le tissu industriel de la nation, en dépit des professions de foi vertueuses de nos ministres qui parlent désormais volontiers de relocalisation de l’économie.

« Et voilà que le dérèglement climatique, dont la planète subit de plus en plus fortement les retombées et auquel les puissants de ce monde ont renoncé à tenter de porter remède — on l’a vu à l’occasion de la COP de Glasgow — percute le surgissement d’une cinquième vague de la pandémie du Covid-19.

« Cette nouvelle alerte sanitaire vient un peu plus souligner les incohérences de la stratégie vaccinale conduite sous l’égide du président de la République et de son très opaque Conseil de défense.  

« Sans doute, une très large partie de la population s’est-elle fait vacciner, depuis l’été. Mais cela ne saurait évacuer ces inégalités intolérables qui laissent nombre des Françaises et des Français les plus fragiles — ce sont des millions de personnes qui sont concernées — à la merci du virus et d’une forme grave de contamination. 

« L’hôpital public et ses soignants doivent, une fois encore, assumer les conséquences d’une politique de santé qui s’est refusée de tirer les leçons du premier pic épidémique, voici près de deux ans. Nous en avons, ces jours-ci, la tragique confirmation : le Ségur de la santé n’aura changé ni l’état de délabrement de l’hôpital public, ni les conditions de travail des personnels. 

« On peut toutefois reconnaître une constance à l’équipe aux affaires : sa dévotion aux dogmes du néolibéralisme, à la loi de la « concurrence libre et non faussée », aux logiques court-termistes consistant à privilégier encore et toujours les « premiers de cordée » au détriment des « premiers de corvée », ne l’aura pas fait changer d’avis à propos de la levée des brevets sur les vaccins. 

« Sur notre continent, autant que pour les pays les plus pauvres du globe, ce serait pourtant la seule solution pour endiguer la prolifération des variants du virus, grâce à un mouvement de vaccination générale.

« Bref, bien que le chef de l’État occupe quotidiennement les écrans, et qu’il conduise sa campagne de réélection au frais de l’État, c’est-à-dire sans avoir à rendre compte de ses dépenses comme les autres candidats, une sourde colère couve toujours dans le pays. 

« Le désintérêt que nombre de nos compatriotes affichent pour les scrutins de 2022 traduit en fait la profondeur de la défiance qu’ils éprouvent envers la politique. On doit redouter que cela n’aboutisse à une nouvelle progression de l’abstention populaire au printemps prochain.

LE RETOUR D’UNE DROITE GORGÉE DE HAINE

« C’est précisément dans ce contexte que le phénomène Zemmour a pris une place centrale dans notre vie publique.

« Avec ce personnage, c’est une droite que nos générations n’ont jamais vue à l’oeuvre qui renaît de ses cendres. Je devrais plutôt dire qu’elle revient des débâcles auxquelles elle aura été associée dans l’histoire de France.

« Cette droite, c’est celle des Ligues de l’entre-deux guerres.

« Une droite gorgée de haine, xénophobe jusqu’à s’être vautrée dans la plus ignoble collaboration avec l’occupant hitlérien, ne rêvant que d’épuration ethnique par détestation des étrangers, des musulmans et des Juifs, en clair de tout ce qui n’est pas considéré par elle comme issu de la « France millénaire ». 

« Une droite affichant aussi son aversion maladive pour les classes populaires. Quand Zemmour parle de nos quartiers et de nos cités, on croirait entendre ses prédécesseurs lorsque, pris d’effroi devant le Front populaire, ils parlaient de la classe ouvrière comme d’un ramassis de « salopards en casquette », et des travailleurs juifs ayant fui l’antisémitisme à l’Est de l’Europe comme d’insupportables « métèques ». D’ailleurs, vous l’avez vu, parlez à Zemmour des jeunes en situation de précarité, il vous proposera d’exonérer des frais de notaire jusqu’à 250 000 euros les primo-accédants à un bien immobilier. Sans commentaire !

« Voilà ce qu’incarne sans complexe cet individu qui s’est retrouvé au firmament de sondages quelques semaines durant. 

« Cela dit, peu importent les fluctuations des enquêtes d’opinion, il nous faut prendre la mesure du projet qui se dessine derrière cette opération. 

« Le contexte, on le sait, est celui d’une crise majeure du mode et des formes de la domination du capital, crise qui n’aura cessé de s’aiguiser au fil des années et qui aura produit l’instabilité politique et sociale chronique que connaît la France.

« Une fraction des forces dominantes — que l’on voit à l’oeuvre lorsque le groupe Bolloré-Vivendi promeut à grands renforts d’audiences médiatiques l’opération Zemmour — a manifestement choisi de répondre à la crise française par l’affirmation d’une solution inspirée de l’exemple de Trump aux États-Unis. 

« Cette solution passe par une recomposition générale de la droite et de l’extrême droite, à partir d’un projet tout à la fois ultralibéral, autoritaire, conservateur et fortement teintée d’identitarisme. 

« C’est sur cette base que les secteurs concernés entendent rassembler un nouveau bloc réactionnaire à même de gouverner la France et de mettre au pas son peuple, en s’attaquant aux grandes conquêtes qui n’ont pas encore été détruites, à commencer par notre système de protection sociale. On voit la place que prend désormais la réforme des retraites dans tous les discours de ce côté-là.

« Cette offensive repose sur un projet, je l’ai dit, elle dispose aussi d’une stratégie. Celle-ci consiste, d’une part, à faire sauter le verrou idéologique que le général de Gaulle avait posé sur son camp, sorti discrédité de l’épisode vichyste, et, d’autre part, à dynamiter l’héritage de la République, telle que la Résistance la renfonda à la Libération.

« Ce n’est pas un hasard si, dans le prolongement des diatribes racistes qui s’en prennent au principe d’égalité entre les êtres humains, sans distinction d’origine, de couleur de peau ou de religion, se trouve de plus en plus mis en cause l’ensemble des droits politiques et sociaux proclamés par le préambule de 1946 de la Constitution.

« On en voit déjà les premiers effets sur un débat politique qui s’empuantit de jour en jour. 

« C’est le cas quand des reclassements commencent à s’opérer entre la droite traditionnelle, le Rassemblement national et le nouveau parti de Zemmour. 

« Cela aura été le cas quand la porosité des frontières entre ces familles politiques se sera spectaculairement manifesté à l’occasion de la « primaire fermée » du parti Les Républicains, avec des candidats — jusqu’à celle qui aura finalement été choisie — en seront venus à piller sans états d’âme le fonds de commerce de l’extrême droite. On aura vu l’un deux flirter avec la théorie du « grand remplacement », on en aura entendu un autre en appeler à ce que notre pays retire sa signature de la Convention européenne des droits de l’Homme, un autre encore en sera venu à préconiser l’ouverture d’un « Guantanamo à la française », sans parler de cet autre qui en aura appelé à abolir le droit du sol.

« Et cela aura encore été le cas quand l’admirateur de Barrès et de Maurras qu’est Zemmour sera parvenu à mettre dans une salle francilienne plus de participants que la parti lepéniste n’en avait jamais réuni dans son histoire. De ce côté-là, une force militante est incontestablement en train de s’organiser, regroupant diverses strates néo-fascistes ou catholiques intégristes. Les passages à tabac qui ont émaillé le meeting de Villepinte doivent nous mettre en alerte sur le tour particulièrement violent que pourrait demain prendre la campagne.  Nous sommes instruits pour le savoir, nous, au vu du nombre de nos sièges qui sont régulièrement maculés d’inscriptions racistes ou antisémites…

« Évidemment, la faiblesse des mobilisations du mouvement social nourrit cette droitisation extrême du débat politique, et celle-ci alimente en retour l’attentisme et le doute dans le monde du travail et les classes populaires.

QUAND LA RÉPUBLIQUE DEVIENT L’ENJEU

« Parce que c’est la République qui se retrouve en grand péril, nul ne peut, nul ne doit, à gauche, demeurer l’arme au pied. 

« Rien ne serait plus dangereux que d’entériner les réorganisations en cours, comme Jean-Luc Mélenchon a paru le faire, en prenant acte de l’existence désormais de trois pôles politiques, au nombre desquels il plaçait son propre mouvement.

« Il nous faut travailler avec détermination à la construction d’une riposte populaire à la hauteur de l’enjeu. Non pas en multipliant des initiatives de rue qui se révèlent généralement très faibles. Mais en livrant pied-à-pied la bataille des consciences, là où elle se déroule effectivement, sur le terrain, dans les quartiers et les entreprises, à l’occasion des porte-à-porte de la campagne. 

« C’est ce que nous avons commencé de faire en nous saisissant de la proposition de résolution du groupe communiste de l’Assemblée, qu’a défendue Fabien Roussel, dans le but de faire plus systématiquement appliquer les préconisations de la loi Gayssot et de voir rendus inéligibles celles et ceux qui incitent à la haine raciale et se livrent à la négation des crimes contre l’humanité. 

« Il convient que nous continuions dans cette voie, et ce doit être l’une des tâches de la direction nationale que de construire cette bataille sur la durée, en l’articulant à la campagne.

« J’ajoute que cette nouvelle donne tend à rebattre, plus généralement, les cartes de la confrontation électorale. 

« Le président-candidat n’est plus aussi certain de sa réélection, qui lui paraissait jusqu’alors acquise. Sa fragilité tient au fait que, s’il possède toujours un socle stable dans l’électorat, il est aussi toujours rejeté par une majorité de l’opinion. Son projet de 2017 consistait à convertir le pays aux normes de la globalisation capitaliste, et à vendre dans la foulée la République à la découpe pour la remplacer par une « start-up nation ». Il a volé en éclats sous l’impact des résistances sociales qui se sont égrenées tout au long du quinquennat, du mouvement des « Gilets jaunes », et de la pandémie des deux dernières années.

« Les difficultés du monarque, un temps dissimulées quand il pouvait s’afficher comme le seul garant de la stabilité du pays, se sont manifestées à l’occasion de la conférence de presse du 9 décembre. 

« Présentant la présidence de l’Union européenne, qu’il va prendre à partir du 1° janvier, il se sera livré à un exercice de funambulisme éloquent. Ainsi, on l’aura entendu parler de préservation de notre « modèle social » tout en se préparant à aller discuter avec les nouveaux gouvernants allemands du rétablissement des règles du pacte budgétaire, évoquer la « souveraineté stratégique » de l’Europe tout en la liant au prochain sommet de l’Otan, se vouloir le champion de la lutte contre le dumping social tout en laissant s’opérer les délocalisations, exalter le prétendu « humanisme » de l’Europe tout en exhortant nos partenaires à renforcer l’action policière contre les migrants.

« Remarquons bien que ces difficultés conduisent les macronistes eux-mêmes à de nombreux emprunts à la rhétorique de l’extrême droite sur les questions d’immigration ou d’insécurité, et au retour à la promesse brutale de remise en cause des conquêtes du Pacte de la Libération, à commencer par notre système de retraite par répartition. 

DÉBATTRE SUR LE FOND À GAUCHE

« En résumé, nous entrons dans une période de forte instabilité et de grande incertitude. Pour en relever les défis, l’état de la gauche constitue le premier des handicaps.

« Celle-ci ne cesse de reculer dans les intentions de vote, ne réunissant plus, à en croire plusieurs enquêtes d’opinion, qu’un quart des personnes interrogées environ. 

« Nous l’avons souvent répété, ces derniers mois, mais cela n’a cessé de se confirmer : le problème ne vient pas d’abord de son éparpillement. Après tout, l’extrême droite elle-même se partage entre quatre candidatures au moins, et cela ne l’empêche pas d’atteindre plus d’un tiers des intentions de vote, niveau qu’elle n’avait encore jamais atteint.

« Se révèlent en cause le poids des renoncements et trahisons du passé devant les volontés destructrices du libéral-capitalisme, l’incapacité de se tourner vers le monde du travail pour porter ses aspirations et y répondre, l’abandon de certaines des valeurs fondatrices du mouvement ouvrier depuis ses origines, le refus de la plupart des candidats d’affronter la domination du capital et de proposer des solutions qui permette que le pouvoir change enfin de mains.

« L’heure n’est évidemment pas aux polémiques, ni aux manoeuvres boutiquières, tant la situation s’avère grave et les enjeux considérables. Nous n’en avons pas moins besoin d’un débat aussi franc que loyal, devant le pays, entre forces de gauche et écologistes. 

« La candidate du Parti socialiste s’était fixée l’objectif de redonner des couleurs à la social-démocratie, après la débâcle du quinquennat de François Hollande, lequel ne nous a légué que Macron… Nous pouvons sans doute partager le souci d’Anne Hidalgo de remettre de la justice sociale dans les politiques publiques. Cela dit, comment y parvenir sans changer le rapport des forces entre capital et travail ? 

« À centrer son projet sur la notion plutôt confuse de « sociale-écologie », elle aura certainement cherché à concurrencer le représentant d’Europe-écologie-Les Verts sur son propre terrain. Mais elle se sera montrée incapable de répondre aux attentes populaires en matière de sécurisation d’emploi, de formation, de salaires, de redéploiement des services publics pour porter une nouvelle logique économique, de réindustrialisation de nos territoires sur d’autres critères d’efficacité sociale et écologique, de rétablissement de la souveraineté du peuple et de la nation pour construire des coopérations internationales relevant les défis de la globalisation capitaliste, de rupture avec la logique des traités régissant l’Union européenne.

« De la même façon, Yannick Jadot se présente comme la force désormais motrice du camp progressiste. Outre que cette prétention hégémonique n’est corroborée ni par les résultats de son parti dans les scrutins de deux dernières années, ni par les sondages, Europe-écologie-Les Verts n’échappera pas à un choix décisif : ou verser, à l’instar de son organisation-soeur allemande, dans la tentation du capitalisme vert, et cela l’amènera à cautionner, comme outre-Rhin, les logiques financières et diktats austéritaires qui ont mené l’Europe dans l’impasse où elle se retrouve présentement ; ou remettre en question le coût du capital pour les êtres humains et la planète.

« Le choix de la rupture avec les logiques capitalistes exige d’oser remettre en question une désindustrialisation qui ruine nos territoires et représente une aberration au vu de l’enjeu écologique ; de s’engager en faveur de grandes filières stratégiques qui réorientent l’économie et au service desquelles devront s’opérer des nationalisations ; de se battre pour que la nation se réapproprie son secteur énergétique grâce à la constitution d’un grand pôle public de l’énergie ; d’avancer l’exigence d’une nouvelle politique pour l’agriculture et l’alimentation, laquelle ne pourra voir le jour sans transformation radicale de la construction européenne.

« Il n’y a pas d’échappatoire possible si l’on veut défendre avec crédibilité, devant le pays, la transition écologique et accoucher d’un nouveau modèle de développement, socialement utile et écologiquement soutenable…   

« Jean-Luc Mélenchon, quant à lui, se présente en tenant d’une « union populaire » dont il serait en quelque sorte l’incarnation. Lui et ses camarades nous appellent régulièrement à nous ranger derrière sa personne pour l’élection présidentielle, en échange d’un accord entre nos deux organisations, et de nos deux organisations seulement, pour les législatives.

« La campagne a déjà mis en évidence des désaccords non négligeables entre nos courants, sur la conception de la République, les idéaux de laïcité ou d’universalisme, la transition écologique ou le mix-énergétique, pour ne prendre que ces exemples. Surtout, nous portons des projets différents.

« Nous voulons, nous, mettre le travail, et le monde du travail dans sa dimension la plus large, au coeur de l’ambition que nous défendons pour la France. 

« Au service de cette ambition, nous avançons des propositions qui cherchent à remettre en cause, en leurs fondements, les pouvoirs du capital, à vouloir reprendre le contrôle de l’utilisation de l’argent.

« Et c’est par la République, cette nouvelle République dont nous dessinons les contours par la bouche de notre candidat, que nous pensons possible de refaire le terrain perdu au profit de la droite, de l’extrême droite, des forces d’argent. Cette République, nous la voulons laïque, résolument porteuse de l’universalité des droits humains, démocratique, sociale, écologique, féministe…

« J’ajoute qu’en affichant cette cohérence, nous n’imaginons pas nous contenter d’affirmer une « union populaire » qui se suffirait à elle-même. Nous voulons défendre une perspective de reconstruction de la gauche dans son ensemble, afin qu’elle se situe au niveau des attentes du peuple et de la jeunesse.

NOTRE MÉTHODE POUR LE RASSEMBLEMENT

Nous cherchons à réveiller un espoir dans le pays, à faire reculer la résignation et la division, à nourrir l’envie de se mobiliser et de renverser la table. La candidature de Fabien Roussel trouve tout son sens en se plaçant  ainsi au service de l’intervention populaire, sans laquelle, nous le savons, le balancier restera dans le camp adverse. 

« Idées et luttes structurent indissociablement notre message…

« Ces derniers jours, à l’initiative d’Anne Hidalgo et d’Arnaud Montebourg, est revenue l’idée d’une primaire de la gauche. Franchement, au vu de ce qu’avait produit la primaire de 2017, alors qu’elle avait pourtant réuni plus de deux millions d’électeurs et électrices, ce n’est pas de cette manière que nous sortirons du marasme. 

« Toute notre histoire atteste que le rassemblement constitue notre ADN. Sauf que le problème est moins que jamais le casting.

« Le problème, c’est le projet, c’est la capacité que nous pouvons avoir ensemble de convaincre les Français que la gauche d’aujourd’hui n’est plus celle qui leur a amené tant de désillusions et de désespérance. 

« La plus élémentaire lucidité amène, dans ces conditions, à conclure que le compte n’y est pas. Et qu’un accord bâclé, pour permettre à telle ou tel de se retirer avec les honneurs, sans que soient pour autant réglés les problèmes sur lesquels nous buttons depuis maintenant des années, ne saurait conduire qu’à un nouvel échec… 

« Face à une droite qui cogne, une droite qui n’a jamais été aussi à droite depuis très longtemps, il faut une gauche qui relève le gant, qui combat sur un projet qui fasse renaître l’espoir…

« Nous portons une autre méthode pour construire le rassemblement que nous persistons à penser essentiel. 

« Cette méthode, c’est que le débat de la présidentielle permette de clarifier les enjeux, qu’il fasse surgir des idées nouvelles, qu’il donne à la gauche dans son ensemble les moyens de se renforcer et d’aller à la reconquête de celles et ceux sans lesquels aucune majorité politique nouvelle ne sera possible. 

« C’est dans cet esprit que nous avons d’emblée, dès notre conférence nationale d’avril, proposé à toutes les forces de gauche et aux écologistes, sans exception, d’aller vers un pacte d’engagements législatifs communs. Pacte dont nous souhaitons que le contenu puisse commencer à être discuté.

« Une dernière remarque sur ce point. Les candidates et candidats désormais déclarés ne sont pas sortis de discussions d’états-majors. Fabien Roussel, par exemple, a été désigné par des dizaines de milliers de communistes, qui ont pris le temps de  réfléchir à sa candidature, qui l’ont désigné à l’issue d’un processus démocratique dont nous sommes fiers, qui ont défini l’ambition qu’il porte à présent devant les Français, et dont l’engagement collectif fait la richesse de notre campagne. 

LA PHASE CRUCIALE DE LA CAMPAGNE

« J’en viens, dans la foulée, à cette dernière.  Avec cette fin d’année, nous sortons d’une première phase de la campagne. C’était, en quelque sorte, la phase d’installation. 

« Nous sommes d’ailleurs parvenus à installer notre candidat, à faire entendre l’originalité de nos propositions et de notre démarche, à nous identifier par notre volonté de nous tourner vers le monde du travail et de répondre à ses attentes. Nous recueillons déjà de nombreuses marques d’intérêt ou de sympathie pour ce que nous portons. 

« Certes, cela ne se traduit pas encore dans les sondages. Ce qui n’est pas vraiment anormal, la grande majorité des Français n’étant pas encore entrée dans les débats de la présidentielle, encore moins dans ceux des législatives. 

« Par surcroît, les phénomènes de décomposition existant à gauche, comme la volatilité des intentions de vote mesurées par les sondeurs à ce moment de la campagne, nous empêchent probablement d’être plus précisément perçus, au-delà des secteurs qui s’intéressent à la politique.

« Il n’empêche que, à travers sa présence dans les médias, ou ses déplacements dans toute la France et auprès des salariés en lutte, Fabien commence à être identifié comme le porte-parole d’une gauche sociale, républicaine, et radicalement transformatrice. Il apparaît que beaucoup attendaient une telle expression. C’est un point d’appui précieux pour la suite.

« La suite, précisément, c’est le dynamique qu’il va revenir aux communistes de construire. Cette dynamique a commencé de voir le jour. 

« Elle a été marquée, point d’orgue de cette longue séquence commencée au printemps dernier, par le meeting de la place Stalingrad à Paris, le 21 novembre. Ne boudons pas notre succès ; réunir plusieurs milliers de participants, en une journée glaciale et pluvieuse, cela faisait longtemps que nous ne l’avions pas fait.

« Autour de cet événement, nous avons lancé les rencontres nationales des « Jours heureux ». Elles se sont ainsi succédé sur l’agriculture et la ruralité, la santé, l’écologie, la jeunesse. La dernière, sur l’éducation et la formation ne date que d’une semaine, elle s’est tenue à Vénissieux.

« Au total, ce sont des milliers de personnes que nous avons déjà réunies.

« La seconde phase de la campagne, celle qui va s’ouvrir dès le lendemain du jour de l’An, va être la plus décisive. 

« C’est celle où tout va se jouer. Où ce sont des millions d’hommes et de femmes qui vont découvrir Fabien. Où la force militante des communistes, sur le terrain et dans les entreprises, va faire la différence. Et où il va nous falloir nous déployer, rassembler autour de nous tous ceux et toutes celles qui s’intéressent à notre parole, construire des comités des J »ours heureux » comme instruments de l’élargissement de la bataille.

« Dans cette phase, outre les clips vidéo et les interventions numériques, les fédérations vont avoir beaucoup de matériel, et en très grande quantité, à leur disposition. Elles auront également à assurer le succès d’importants rendez-vous : nouvelles rencontres thématiques, meetings nationaux et départementaux, déplacements du candidat… 

« Je ne développe pas davantage, pour ne pas allonger la durée de mon propos introductif. D’autres camarades préciseront cette dimension dans le cours de notre discussion.

LE PROJET, UN GRAND TEMPS FORT EN JANVIER

« Naturellement, la sortie du projet sera l’un des temps forts de cette phase cruciale. Beaucoup de nos camarades l’attendent avec une certaine impatience, et sa sortie à la fin du mois de janvier « boostera » très certainement la campagne. J’ajoute que, pour beaucoup de celles et ceux dont les interventions de Fabien éveillent l’intérêt, c’est le projet qui est en premier lieu recherché lorsqu’ils viennent visiter notre site de campagne.

« Vous avez donc reçu, hier, la première version de ce document. Elle émane, vous le savez, du groupe de travail que le comité exécutif national avait chargé de cette mission, et que j’avais la charge de coordonner. (…)

« Les propositions, dont nous avons tenté de faire la synthèse, ne proviennent pas principalement de nos cerveaux, bien qu’ils soient fertiles. 

« Nous avons travaillé à partir d’une masse absolument considérable de contributions livrées par les commissions et secteurs, mais également des notes qui ont servi de bases aux annonces de Fabien à l’occasion des rencontres des « Jours heureux »

« J’ajoute que nous nous sommes également nourris des élaborations programmatiques du parti ces dernières années : qu’il s’agisse de l’esquisse de programme de sortie de crise, que nous avions adoptée ici au printemps 2020, des axes programmatiques formulés dans la résolution adoptée par la conférence national d’avril. En n’oubliant ni le texte « La France en commun » de 2016, ni les quelque 1300 contributions que nous avons recueilli sur le site qui porte ce nom.

 « J’en viens au fond. Le document reprend, vous aurez pu le constater, la démarche que j’avais proposée au conseil national de rentrée. (…) 

« Nous avons voulu vous présenter un document qui ne soit pas un simple programme de législature ou de mandature. Il s’agit plutôt d’un projet pour la France, dont nous avons cherché à restituer la cohérence, et qui intègre un programme pour la mandature et la législature.

« Au vu de la richesse des élaborations produites par le parti, il nous a semblé utile de recueillir tous les avis possibles, au-delà de notre instance, à commencer par ceux de nos parlementaires (…), et de profiter de leurs suggestions éventuelles.

« De même, il peut nous être collectivement utile de connaître, avant publication les réactions de syndicalistes ou de personnalités que nous avons l’habitude de côtoyer. (…)

« En faisant bon usage des trois semaines qui nous séparent de la nouvelle année, le groupe de rédaction aura pour mission d’achever son travail, d’enrichir le document à partir de tout ce qui remontera à la suite de nos sollicitations. 

À ce conseil national, vous allez donc pouvoir exprimer vos remarques, réactions, propositions de modification ou d’enrichissement. »

Au lendemain de cette session du conseil national, les débats à gauche auront plutôt conforté les communistes dans la conviction qu’il fallait se tourner vers le peuple français, débattre devant lui — et avec lui — des projets que portent les candidatures en présence, projets dont les différences ne cessent de sauter aux yeux, s’employer à faire bouger les lignes afin de créer les conditions à terme d’un nouveau rassemblement. Certainement pas à pratiquer l’entre-soi d’échanges aigres-doux à, propos d’une « primaire » qui, en l’état, ne vise qu’à régler les questions de casting sans traiter au fond les problèmes posés à notre camp social et politique. La présidentielle peut et doit être le moment d’un grand débat, franc et loyal, afin de sortir du marasme dont les compromissions passées de certains avec le néolibéralisme sont responsables, et de surmonter la défiance qui en découle de la part du monde du travail, des classes populaires ou de la jeunesse.

Christian_Picquet

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