Une tribune pour ‘l’Huma-Dimanche”
Je viens de donner une tribune à l’Humanité-Dimanche. Plusieurs personnalités (Pierre Laurent, le coordinateur national du Parti communiste, Martin Malvy, président réélu du conseil régional de Midi-Pyrénées, et Dominique Bucchini, le tout nouveau président communiste de l’Assemblée de Corse) y répondent comme moi à la question : “Que faire de la défaite de la droite ?”
“Répondre vite aux aspirations des classes populaires”
C’est la leçon première des élections régionales : le pays va au devant d’épreuves sociales et politiques décisives. Rarement la question d’une alternative politique crédible ne se sera-t-elle posée avec une telle acuité. Rarement le besoin de gauche, la nécessité que la gauche redevienne la gauche ne se seront-ils exprimés avec autant de force.
Sans appel, la politique de Nicolas Sarkozy est aujourd’hui désavouée, son projet de refonte réactionaire de la société est sanctionné, son autorité même et la légitimité de sa majorité sont mises en cause, sa tentative d’imposer au forceps la bipolarisation de la vie publique est en miettes. Une crise de régime menace. En même temps, atteignant des proportions inédites depuis les origines de la V° République, l’abstention signe une souffrance sociale et une désespérance politique abyssales. Cette grève des isoloirs traduit une crise majeure de la représentation politique et institutionnelle. D’autant qu’elle se conjugue à la remontée d’une extrême droite vers laquelle pourrait de nouveau s’égarer la colère d’une fraction du peuple et se réfugier sa volonté de changement.
À cet égard, si en ce début de printemps, la gauche aura été la grande bénéficiaire du rejet du sarkozysme gouvernemental, elle ne saurait s’aveugler sur l’ampleur des défis qu’il lui appartient de relever. Alors que la droite se prépare à relancer ses attaques destructrices, contre le droit à la retraite à 60 ans par exemple, l’exaspération du monde du travail dessine des confrontations sociales majeures dans la prochaine période. Pour qu’elles se révèlent en mesure de l’emporter, pour que les futurs rendez-vous électoraux rouvrent le chemin de l’espoir à celles et ceux que démobilise un terrible sentiment d’impuissance face aux ravages d’un capitalisme chaque jour plus vorace, il convient de se tourner résolument vers les classes populaires et de répondre à leurs attentes.
Dit autrement, l’urgence est de rompre avec les logiques de renoncement devant un libéralisme en faillite, celles qui ont mené la gauche à toutes les défaites de ces quinze dernières années. L’urgence est d’en finir avec les tentatives de recomposition au centre, que continuent à porter tant de responsables du Parti socialiste ou encore Daniel Cohn-Bendit, en dépit de l’effondrement du Modem. L’urgence est de ne plus confondre la prise en compte de l’exigence écologique avec l’accompagnement d’un « capitalisme vert » qui en est la négation même.
Dans la reconstruction d’une perspective à la hauteur, il revient au Front de gauche une responsabilité primordiale. Bien sûr, à ce scrutin des régionales, il n’a pas bénéficié de la dynamique qu’il pouvait légitimement escompter. Il ne s’en sera pas moins enraciné dans le paysage politique hexagonal, jusqu’à devenir la troisième composante incontournable de la gauche. L’écho de sa campagne aura, de surcroît, dépassé de très loin le nombre des suffrages obtenus. Son existence même et l’intérêt que lui vaut le rassemblement dont il porte les couleurs seront, dès demain, un précieux encouragement aux épreuves de force qui s’annoncent. Sa jonction, depuis un an, avec divers secteurs du monde syndical et associatif entrouvre une nouvelle opportunité de coopération entre mouvement social et forces politiques.
Fort de ces acquis, il lui appartient de s’assurer de la visibilité nationale et permanente qui lui a partiellement fait défaut ces derniers mois. D’organiser la présence conjointe de ses diverses composantes à l’occasion des confrontations sociales et politiques à venir. De s’élargir aux forces politiques partageant sa démarche, et plus encore aux secteurs de la gauche sociale et intellectuelle en recherche d’un véritable prolongement à leurs engagements de terrain. De se doter, non plus seulement de plates-formes électorales ponctuelles, mais d’un début de projet de société appuyé sur une proposition de nature à cristalliser l’aspiration à un changement radical qui se fait jour dans la société : un nouveau Front populaire, appuyé sur la mobilisation sociale et porteur d’une politique de rupture avec le capitalisme et le productivisme. Ainsi pourrait-il affirmer son ambition de faire bouger les lignes à gauche et de conquérir une majorité dans le pays.
Tel serait l’objectif des Assises du Front de gauche dont la Gauche unitaire suggère l’organisation pour la fin de l’année…